SENEGAL-SANTE-OUTIL
Par Ndèye Suzanne Sy
Dakar, 29 juil (APS) – Le Service d’assistance médicale d’urgence (Samu) du Sénégal, un dispositif mis en place pour la prise en charge des urgences et des accidents de la route a comme crédo de sauver des vies en un temps record. Il joue un rôle de premier plan dans la prise en charge des patients victimes d’accident dans la mesure où l’heure d’or est une réalité en médecine d’urgence.
Créé en 2005, le Samu est considéré comme un Etablissement public de santé (EPS), car assurant les premiers soins en cas d’accident. Sa mission est de garantir une prise en charge rapide, efficace et adaptée du patient.
La prévalence des accidents de la route est de 14, 44 %, a révélé l’enquête STEPS 2024 dédiée à la fourniture de données sur les facteurs de risque des Maladies non transmissibles (MNT).
”La prévalence des accidents de la circulation est de 14,4%”, a affirmé le docteur Malick Anne, chef de la division de la Lutte contre les maladies non transmissibles, lors de la restitution des résultats de cette enquête le 2 juillet 2025. Dans cette valeur représentant les accidents de la circulation, ‘’30% représentent le taux de non portage de la ceinture de sécurité ; 41,5 % représentent le portage de casque de sécurité”, a-t-il indiqué.
”L’accidentologie, c’est une partie de ce qu’on appelle l’aide médicale urgente qui entre dans le préhospitalier. Dans ce cas de figure, nous jouons sur le délai d’intervention, parce qu’il y a l’heure d’or qui est un concept d’urgence médicale qui permet de sauver des vies grâce à des interventions rapides”, a expliqué le docteur Abdallah Wade.
Dans un entretien avec l’APS, il a indiqué que ”dans le monde des urgences, lorsqu’un accident survient, pendant le relais, après l’intervention des sapeurs-pompiers, on continue la prise en charge, donc la médicalisation des secours”. ”La prise en charge, les soins in situ, et la coordination avec les récepteurs, la structure sanitaire qui doit recevoir la victime. Et donc, il y a un continuum de soins pendant tout le transport’’ du patient, a-t-il dit.
Selon lui, l’aide médicale urgente, c’est la partie urgente pure. L’assistance occupe un état plus large. L’accidentologie, donc, va entrer dans le cadre du préhospitalier.
Dans le préhospitalier, ”tout peut se passer dans les maisons, sur la voie publique, dans les établissements qui reçoivent du public, les chantiers”, explique-t-il.
Logé au sein de l’hôpital de Fann en face du centre antipoison, le Samu dispose d’une vingtaine d’ambulances médicalisées prêtes à assurer le transport des malades.
Selon Dr Wade, ”ces véhicules sont équipés d’un dispositif qui peut même assurer la prise en charge d’un patient qui doit être réanimé avant d’être acheminé à l’hôpital”.
Le dispositif est constitué d’un infirmier formé à la prise en charge des malades en réanimation, un ambulancier médecin qualifié à la prise en charge des urgences et un médecin urgentiste ou anesthésiste réanimateur.
A l’entrée du Samu, des ambulances campent le décor. Peintes en blanc et bleu, certaines sont en panne depuis longtemps et recouvertes de poussière, les pneus crevés. D’autres sont en bon état bien, équipées et prêtes à partir.
A l’accueil, deux agents veillent à l’orientation des visiteurs. Un bâtiment de deux étages sert de siège social au Service national sanitaire en charge de la régulation et de la coordination des urgences médicales sur l’ensemble du territoire national.
Le premier niveau est réservé au Centre d’enseignement de soins et gestes d’urgence médicale pour les professionnels de santé. Au deuxième et dernier étage, se trouve le Centre de réception et de régulation des appels (CRRA) qui reçoit les appels d’urgence. Dans ce département, trois postes de réception des appels sont aménagés dont deux fonctionnels occupés par trois télé-opérateurs et un troisième est activé en cas de crise sanitaire.
Au fond de la salle, un autre bureau est aménagé avec un dispositif qui permet aux autorités d’inter agir avec le personnel du Samu en cas de besoin. Il a beaucoup servi lors de de la pandémie de Covid-19, a confié le responsable des lieux trouvé sur place.
”L’urgence n’attend pas”
Dans la salle qui abrite le centre d’appel, les agents donnent le signal. Un coup de fil signifie une prise en charge, mais lorsque l’alarme sonne deux fois, il ne faut pas attendre, il y a urgence.
Un service mobile d’urgence est prêt à intervenir à tout moment. Après un appel, une décision est prise dans l’immédiat pour l’envoi d’une équipe médicale, laquelle est composée d’un médecin urgentiste, d’un infirmier urgentiste et d’un ambulancier urgentiste.
Et selon la demande, une ambulance correspondant au type d’urgence est convoyée. Par exemple, pour une urgence néonatale, il faudra un dispositif pédiatrique nécessaire pour réanimer un nouveau-né.
Les autres ambulances sont équipées pour prendre en charge une victime ou un patient qui se trouve dans un état critique. Il s’agit d’ambulance dite de type C, laquelle dispose même d’une chaise roulante.

Revenant sur les raisons qui ont poussé les autorités à créer le Samu, joignable au 1515, son directeur évoque le caractère pressant des urgences.
La question des urgences est ”un problème capital. C’est un problème que vivent les gouvernants, pratiquement à un niveau beaucoup plus déconcentré, depuis la communauté jusqu’au sommet, parce que l’urgence n’attend pas’’, a expliqué le docteur Wade.
Il a également relevé l’urgence vitale. “Et étant donné que c’est quelque chose qui se fait de façon inopinée, il peut y avoir souvent des problèmes qui sont liés à la vie, à un problème de finances parfois”, a dit le médecin urgentiste.
Selon lui, “la structuration du ministère de la Santé est à l’origine de la mise en place du Samu qui prend en charge tout ce qui est médecine préhospitalière. Quand on dit médecine préhospitalière, c’est avant tout ce qui se passe à l’hôpital”.
Ce service dispose de 4 pôles, le pôle de Dakar, le pôle centre, le pôle sud et le pôle oriental. Dans l’agenda national de déconcentration, il est prévu de renforcer ce service pour arriver à 8 pôles, au moins, et mettre en place des systèmes de prise en charge au niveau de chaque région.
‘’Le Samu va intervenir à travers une collaboration avec un comité, dans le cadre de ce qu’on appelle la médicalisation des secours. Mais quand il y a un appel, le Samu sort. Il y a même une organisation qui fait que lorsqu’il y a un accident, le Samu sort dès qu’il a l’information’’, a expliqué Abdallah Wade.
Cette intervention sur le terrain nécessite une organisation, mais également une régulation puisqu’au-delà du Samu, il y a les sapeurs-pompiers qui répondent aux appels d’urgence pour des personnes malades, blessées, intoxiquées ou victimes d’accident.
Abdallah Wade renseigne que dans le cadre de la régulation, “il a été mis en place un poste de pompier pour savoir ce qui se passe sur le terrain par rapport aux accidents, mais également aux informations d’alerte que reçoivent les pompiers”. ”Donc, ça nous permet parfois d’anticiper lorsqu’ils ont un événement. On sait d’emblée, après l’émission de téléportation, que c’est un accident grave, qu’il y a des risques”, a-t-il dit
Samu et Sapeurs-pompiers : une régulation optimale des interventions
‘’Lorsqu’il y a accident, on y va en même temps. Si les sapeurs viennent à nous, en ce moment, on coordonne à médicaliser les secours, parce qu’ils n’ont pas de médecins urgentistes, et nous, on en a’’, a-t-il indiqué.
D’après lui, il faut une organisation pour la prise en charge, autant à l’hôpital, sur la voie publique, qu’au niveau des établissements qui reçoivent du public.
Ce qui implique, selon le directeur du Samu, de gérer un accueil. ‘’Cet accueil va être organisé et il doit y avoir une coordination entre les acteurs avant l’hôpital et ceux qui doivent recevoir les victimes à l’hôpital”, ce qui nécessite une continuité de soins depuis la prise en charge au niveau préhospitalier.
Les accidents font partie des ”interventions primaires’’. Tout se fait essentiellement au niveau préhospitalier. Il sont pris en charge par des acteurs qui peuvent être publics ou privés et également par les premiers secours.
‘’Tout se fait pour qu’il y ait une augmentation des chances de survie. Parce qu’une personne qui a un problème avant l’hôpital, si elle n’est pas bien prise en charge, ça peut diminuer ses chances de survie avant qu’elle n’arrive à l’hôpital’’, alerte Abdallah Wade.
‘’Comme on dit, les crises cardiaques, les accidents graves, tout cela nécessite une prise en charge avant l’hôpital. Et cette prise en charge avant l’hôpital doit être assurée. L’État a mis en place ces services pour gérer tout cela’’, a-t-il insisté.
Le 1515, le premier réflexe à faire pour bénéficier de soins primaires avant l’hôpital
Pour jouer son rôle, il faut une organisation. ”On dit qu’on entre au Samu par un numéro 15,15”, soutenu par un centre d’accueil, a dit Dr Wade.
”Ce qu’on appelle le centre de réception et de réunification des accueils. Pour y arriver, il faut un numéro. Le 15, c’est l’horloge parlante. Le 1515, c’est le centre’’, a-t-il expliqué.
En plus de cela, viennent les autres éléments, parmi lesquels le Centre d’enseignement de soins et de geste d’urgence (Cesgu) qui assure la formation initiale et continue. Le centre peut accueillir jusqu’à 100 étudiants.
Dans ce centre, une salle de simulation est aménagée avec des mannequins disposés selon les types d’intervention à mener, servant de guide aux futurs urgentistes.
Une salle de contrôle où on peut suivre simultanément les exercices effectués sur les mannequins est également disponible dans les locaux du Samu. Un stockage, accessible aux agents formateurs, est assuré pour un revisionnage de tous les cours.
Sur le site du Samu, on retrouve une plaquette de cours avec les modes d’inscription directe. Il faut préciser qu’il y a une partie simulation dans la médecine d’urgence de manière spécifique.
Agrandissement, finances, le délai d’intervention, les défis du Samu
‘’Le SAMU, naturellement, doit s’agrandir aussi bien au niveau des infrastructures, du système de santé et de son fonctionnement’’, estime Abdallah Wade.
‘’Au niveau des interventions, il y a deux éléments à considérer. Dans certaines situations, nous jouons sur le délai d’intervention. Pour ce faire, il faut aller vite”, a-t-il fait savoir.
‘’Même avec la sirène, il y a souvent des des défis tels que les bouchons. Donc, ça joue sur le délai d’intervention’’, relève le médecin urgentiste.
Il rappelle que ‘’le temps d’arriver sur les lieux d’un accident par exemple se situe en moyenne entre 15 à 30 minutes. Un délai qui peut évoluer par moment. En journée, il est difficile de circuler contrairement en soirée où il y a moins de trafic’’.
‘’Pour aller sur un contournement, nous convoyons les victimes vers des unités hospitalières. Il s’agit des districts qui sont les plus proches des zones d’intervention, ce qui permet une diminution du délai d’intervention’’, a-t-il précisé.

Il souligne en outre que ‘’si tout est concentré au niveau de la base en ce moment-là, le délai d’intervention peut être long. Parce qu’en plus de la circulation, d’autres facteurs peuvent intervenir’’, a-t-il fait valoir, plaidant pour un type de pré positionnement.
Face à cette situation, Abdallah Wade propose entre autres solutions, de doter la structure de moyens matériels et logistiques conséquents.
”Le plan de développement qui va bien se mettre en place va nous permettre d’agir sur les piliers comme les infrastructures, la logistique et les ressources humaines’’, a-t-il énoncé.
432 515 appels entrants traités en 2024
En 2024, ”on a eu 432 515 appels entrants qui ont été traités’’, a informé Abdallah Wade.
Et parmi ces appels traités, ‘’on a eu au moins 396 661 qui avaient un caractère médical. Il s’agit du rôle que joue le CRRA qui montre ce qui est en train d’être fait. A Saint-Louis, aussi, on est dans une fourchette de 80 000 environ’’, a-t-il ajouté.
Le SAMU implanté à Kaolack gère également les régions de Fatick, de Kaffrine
Sur l’organisation du travail, il précise que des ambulances seront à Fatick et au niveau de Kaffrine. “Et le centre de réception et de régulation des appels va coordonner tous ces appels qui vont venir dans cette zone’’, a expliqué le docteur Wade.
Selon le directeur du Samu, le même numéro est utilisé et les appels sont envoyés directement vers ce centre.
Face à la recrudescence des accidents, le médecin urgentiste estime que le secourisme de base doit être connu de tout le monde. ”Avant, la formation aux premiers soins était dédiée à la Croix-Rouge et aux sapeurs-pompiers, mais les premiers soins doivent être connus de tous”, plaide Dr. Abdallah Wade.
Dans ce cadre, il informe que le Samu est allé dans certaines écoles pour apprendre aux enfants les gestes d’urgence.
Les antennes régionales mènent aussi la formation dans les entreprises qui ont des conventions avec le Samu.
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