Kaolack : la résilience et l’ingéniosité des vendeurs de café Touba face à la flambée des prix de la matière première
Kaolack : la résilience et l’ingéniosité des vendeurs de café Touba face à la flambée des prix de la matière première

SENEGAL-ECONOMIE-REPORTAGE

Kaolack, 16 sept (APS) – A Kaolack (centre), les vendeurs de café Touba multiplient les stratégies pour continuer à faire du profit après plusieurs hausses du prix de ce produit de consommation courante au Sénégal.

Le café Touba fait partie des boissons chaudes les plus populaires du pays. Son commerce, jadis très lucratif, est en butte à la flambée du prix la matière servant à le préparer. 

De 2 000 à 2 500 francs CFA le kilogramme, le prix de la poudre de café Touba est passé à 5 000 voire 5 500 francs CFA dans les boutiques.

Même si la demande est intacte du côté des amateurs, la marge de bénéfice s’est considérablement effritée, se plaignent les vendeurs kaolackois interrogés par l’APS. C’est pourquoi, ces derniers font preuve de créativité et de résilience pour palier ce manque à gagner.

Issu de graines de café torréfiés et infusés avec du poivre de Guinée et des clous de girofle, le café Touba est la boisson fétiche de beaucoup de Sénégalais qui en boivent plusieurs tasses par jour.

Plus qu’une simple boisson, prendre du café Touba est devenu un mode de vie pour beaucoup de Sénégalais, qui lui attribue des pouvoirs curatifs voire plus.

Ce breuvage aurait été rapporté au Sénégal par le fondateur du mouridisme, une confrérie musulmane, Cheikh Ahmadou Bamba, plus connu aussi sous le nom de Serigne Touba, à son retour d’exil du Gabon en 1902. Cette dimension, à la fois, spirituelle et culturelle, donne au café Touba sa notoriété auprès des populations.

Ayant flairé cette grande opportunité d’affaire, beaucoup de Sénégalais, notamment les jeunes se sont lancés dans la vente de ce breuvage.

Moustapha Niang, plus connu sous le surnom d’Amdy, est l’un d’eux. Ce vendeur de café Touba est établi au quartier Boustane à côté de la route nationale. 

Vêtu d’un large caftan communément appelé ‘’Baay Lahat’’, Amdy sert du café Touba avec entrain à ses clients, qui ingurgitent tasse sur tasse.

Son point de vente, plus qu’un espace commercial, est devenu un lieu de rencontre des férus du café Touba, qui viennent siroter leur boisson du matin au soir, dans une atmosphère conviviale.

Face à l’augmentation du prix du café en poudre, Moustapha dit adopter une stratégie pour garder sa clientèle et maintenir un niveau de bénéfice acceptable.

‘’Je propose deux tarifs à mes clients. Une tasse à 50 francs CFA et une autre à 100  francs CFA”, confie-t-il ; ce qui lui permet de s’en sortir et de ne pas perdre sa clientèle.

Même s’il reconnait qu’avec 50 francs CFA, le consommateur a la moitié de ce qui se vendait auparavant au même prix, Amdy soutient que pour beaucoup d’amateurs du café Touba, la quantité bue à un instant donné n’est pas très importante, mais plutôt la fréquence.

— ‘’Qu’importe le volume, l’essentiel est de calmer son addiction” —

Un avis que partage Yatma Diop, un de ses fidèles clients, rencontré tasse de café à la main. Pour ce jeune à la silhouette svelte, même une gorgée de café Touba peut calmer son addiction au café Touba. Qu’importe le volume, selon lui, est d’en avoir à chaque fois que de besoin.

Non loin du lycée technique et commercial El Hadji Abdoulaye Niass, se dresse le commerce de Khadim Fall dit Bamba café. L’homme aux longs dreadlocks et à la noirceur luisante s’active dans la vente de café Touba depuis plus de cinq années.

Kaolack : la résilience et l’ingéniosité des vendeurs de café Touba face à la flambée des prix de la matière première

Les effluves aromatisés qui se dégageant des thermos posés sur une table décorée d’effigies de marabouts et garnie de sachets de beignets, semblent attirer les amateurs de café Touba qui se succèdent devant le comptoir.

Comme Amdy, Bamba Café dit réajuster ses prix face à la hausse du prix de la poudre de café Touba. Pour augmenter ses gains, il propose à ses clients, à côté du café Touba, des beignets et des cacahuètes, en plus des services à domicile qu’il effectue pour ceux qui ont des cérémonies Bamba café’ affirme que grâce à ces différentes activités, il parvient à s’en sortir.

Les vendeurs en gros de poudre de café Touba rencontrés à Kaolack justifient l’augmentation du prix par une rareté de la graine brute et par une hausse des coûts d’importation.

Selon Gora Diagne, vendeur de poudre de café, la culture du café traverse une période de crise, causée d’une part par le changement climatique et les restrictions imposées aux importateurs par les pays producteurs, d’autre part.

Debout devant son moulin à café, Diagne affirme que ces restrictions ont fait que les importateurs ‘’bana-bana’’, terme wolof désignant les petits importateurs informels, sont rayés du circuit d’approvisionnement.

Malgré des charges de plus en plus importantes chez les vendeurs, l’odeur de cette boisson continue d’attirer dans les rues de la ville de Kaolack de plus en plus d’amateurs.

PMD/ADE/ABB/OID