Dakar, 11 juil (APS) – Le Consortium régional pour la recherche en économie générationnelle (CREG), le Population Reference Bureau (PRB) et la direction de l’équité et de l’égalité du genre (DEEG) ont mené une concertation, mercredi et jeudi, à Dakar, en vue de la “reconnaissance” et de la “valorisation” du travail domestique non rémunéré (TDNR) des femmes.Le but de cette rencontre à laquelle ont pris part des députés et des représentants du ministère de la Famille et des Solidarités était de “discuter de manière stratégique” de cette question et d'”orienter les politiques économiques et sociales” vers la prise en charge du TDNR des femmes, selon des documents reçus des organisateurs.“L’objectif principal de ce dialogue est de partager les résultats de la recherche sur le travail domestique non rémunéré”, précisent-ils.“On s’attend à ce qu’émerge un dialogue intersectoriel et multipartite sur l’économie du soin, en mettant l’accent sur le TDNR”, lit-on dans les documents.“Permettre à la femme de s’épanouir et de mener une vie professionnelle”Le CREG, le PRB et la DEEG disent être “conscients de l’importance du travail domestique féminin et de l’envergure de son apport socioéconomique”.Les échanges qu’ils ont eus au cours des deux jours doivent servir de “réponse à la nécessité d’utiliser des données probantes de la recherche pour informer les politiques économiques et sociales au niveau macroéconomique”, concernant le TDNR.Les documents relèvent “l’impact significatif du travail non rémunéré des femmes sur la croissance économique et la négligence persistante de la charge économique et temporelle féminine dans les politiques publiques”.“L’État a toujours fait face à cette problématique. L’article 17 de la Constitution du Sénégal nous parle du droit à l’allègement des travaux de la femme. Je pense que l’État a très tôt pris en compte [le] travail domestique non rémunéré […] Nous sommes très réconfortés parce que, pour la première fois, on voit cette thématique intégrée dans un référentiel de développement économique et social”, a souligné Astou Guèye Diouf, la directrice de l’équité et de l’égalité du genre au ministère de la Famille et des Solidarités.“Nous voulons que les acteurs, ceux qui travaillent sur les questions d’égalité entre hommes et femmes, les parlementaires aussi, fassent l’évaluation des politiques publiques sur des bases scientifiques. C’est l’occasion de remercier le CREG, qui nous accompagne depuis 2019 dans ce domaine”, a ajouté Mme Diouf.Le but recherché par le CREG, la DEEG et le PRB “est le bien-être des personnes qui font ces tâches”, a-t-elle précisé. “Nous avons remarqué que les femmes sont […] des pourvoyeuses de tâches domestiques non rémunérées. Ce sont des tâches invisibles, qu’on peut valoriser par la redistribution. Le programme d’allègement [des travaux des femmes leur] a fourni des équipements, par exemple.”Les échanges devraient aussi “permettre à la femme de s’épanouir, de mener une vie professionnelle et des activités économiques”, a dit Mme Diouf.“On a remarqué, dans les analyses économiques, que le travail domestique non rémunéré est invisible parce que simplement il n’est pas payé […] Le fait qu’il n’est pas rémunéré n’est pas le problème pour la femme”, a précisé Aïssata Fall, la directrice pour l’Afrique du PRB, une organisation non gouvernementale.“Il ne s’agit pas de la rémunérer en tant que femme au foyer, qui travaille. Elle n’a pas besoin d’être rémunérée pour une fonction attribuée par la famille, la tradition et la culture”, a souligné Mme Fall.“La lancinante problématique des travaux de soins non rémunérés”La femme exécutant un TDNR “a besoin de ne pas être punie socialement parce qu’elle fait ce travail. Si elle doit rester travailler à la maison sans pouvoir cotiser pour une pension de retraite et n’a pas d’assurance maladie, comment est-ce qu’elle fait ? Elle a besoin d’être aidée par des politiques publiques”, a-t-elle plaidé.“Je ne pense pas qu’une femme demande à être payée pour le travail qu’elle fait à la maison. Cela fait partie de ce qu’elle est même”, a-t-elle tenu à préciser.Le TDNR est “un domaine qui touche toutes les femmes, qu’elles soient au foyer ou travailleuses”, a expliqué Astou Guèye Diouf en lisant aux participants de la rencontre une allocution de la ministre de la Famille et des Solidarités.En évoquant “la lancinante problématique des travaux de soins non rémunérés”, Mme Diouf a salué la présence à cette concertation de représentants de l’Assemblée nationale.“Vous avez la légitimité pour porter le plaidoyer auprès du gouvernement, pour une prise en compte de la question du travail non rémunéré dans l’économie nationale, afin de corriger les inégalités et les disparités entre les hommes et femmes dans le développement socioéconomique”, leur a-t-elle dit.“En tant que parlementaires, votre engagement et votre action sont essentiels pour promouvoir des réformes qui soutiennent les travailleurs domestiques et de soins, pour assurer leur protection sociale et garantir une répartition équitable des responsabilités sociales entre les sexes. Nous savons que ce travail domestique non rémunéré, principalement effectué par des femmes, représente une contribution massive à notre économie, bien qu’il soit rarement reconnu à sa juste valeur”, a poursuivi la directrice de l’équité et de l’égalité du genre, s’exprimant au nom de la ministre de la Famille et des Solidarités.Réévaluer les priorités économiques et socialesElle souligne que “ce travail, qui englobe les soins fournis aux enfants et aux personnes âgées, et l’entretien du foyer, est essentiel au bon fonctionnement de notre société”.Astou Guèye Diouf appelle à “réévaluer nos priorités économiques et sociales”, à “reconnaître et [à] valoriser le travail domestique et de soin, et [à] veiller à ce que ceux qui l’accomplissent reçoivent le respect et la reconnaissance qu’ils méritent”.“Quatre-vingt-dix pour cent des femmes participent au travail non rémunéré, contre 54 % pour les hommes. Cet écart est préoccupant, d’autant plus que, sur une journée théorique de vingt-quatre heures, les femmes consacrent 21 % de leur temps à ce travail contre 8 % pour les hommes, soit un écart de 13 %”, a-t-elle signalé sur la base de données de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie du Sénégal et d’ONU Femmes, l’agence des Nations unies chargée des questions du genre.“Cette situation présente évidemment des conséquences préjudiciables sur la santé et le bien-être, ainsi que sur la vie professionnelle des femmes, qui sont souvent confrontées à des obstacles pour accéder ou se maintenir à des hauts postes de responsabilité et avoir un traitement salarial égal dans certaines circonstances”, a relevé Astou Guèye Diouf.S’agissant des solutions, elle est d’avis qu'”il est possible d’opérer des transformations qualitatives pour mettre les femmes dans des conditions optimales de réalisation de leur plein potentiel”.ESF/BK
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