Paris accusé d’avoir ”caché” certains documents sur le massacre de Thiaroye en 1944
Paris accusé d’avoir ”caché” certains documents sur le massacre de Thiaroye en 1944

SENEGAL-FRANCE-COMMEMORATION

Dakar, 17 oct (APS) – Le Comité de commémoration du massacre des Tirailleurs sénégalais a accusé vendredi à Dakar, la France de dissimuler certains documents pouvant aider à faire toute la lumière sur le massacre des Tirailleurs sénégalais le 1er décembre 1944 à Thiaroye, un quartier de la banlieue dakaroise.

‘’Notre travail d’historien nous a amené à dire […] qu’il y a des documents qui manquent. Et nous savons pourquoi ils manquent parce qu’on ne peut pas comprendre qu’il y ait des soldats qui embarquent dans un bateau et il y a pas de manifeste’’, a déclaré Rokhaya Fall, présidente de la commission Etablissement des faits au sein du Comité de commémoration du massacre de Thiaroye en 1944.

Elle s’exprimait au cours d’une conférence de presse de la structure à la suite de la remise officielle du “Livre blanc sur le massacre de Thiaroye” au Président de la République, jeudi.

‘’Nous en concluons que ce sont des documents cachés quelque part. On les a pas encore retrouvés mais cela ne peut pas nous empêcher de faire notre travail. C’est notre travail qui nous a permis de découvrir qu’il y a eu des documents cachés’’, a fait valoir l’historienne Rokhaya Fall.

”La France soutient avoir remis tout ce qu’elle a en sa possession, mais les historiens estiment qu’il y a des documents cachés quelques part. De même qu’il y a aussi d’autres documents qui ne sont pas accessibles du fait de l’armistice proclamée en 1918”, a poursuivi Rokhaya Fall.

L’historien Mamadou Diouf, président du Comité de commémoration du 80e anniversaire de cet événement historique, a abondé dans le même sens, estimant que ”le principal souci c’est de rouvrir les dossiers historiques du massacre de Thiaroye”.

Les familles peuvent décider d’ester en justice la France

Interpelé sur la question de la réparation, le Comité de commémoration estime que ”lorsqu’qu’il aura à sa disposition toutes les informations relatives aux violences coloniales que les victimes auraient subi, les familles peuvent décider d’ester en justice la France”.

‘’Le pouvoir colonial avait une violence extraordinaire dans l’imposition du silence[…]. Si toutes les incertitudes sont levées, les Etats d’Afrique de l’Ouest peuvent demander réparation et négocier’’, a-t-il dit citant l’exemple de Haïti qui avait payé une importante somme d’argent à la France pour rembourser la perte des esclaves lors de sa révolution pour l’indépendance.

Selon Mamadou Diouf, la sous-commission juridique a essayé de faire l’étude de l’ensemble des actes juridiques mais aussi de ”qualifier le massacre de Thiaroye comme un crime contre l’humanité”.

‘’Ce qu’il est important de comprendre c’est que l’ordre colonial est un ordre violent’’, a déploré Ndiouga Bengha, l’enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), membre de la commission Traitement et Exploitation.

Il affirme que les sondages réalisés ont permis d’éclairer sur le nombre victime lors du massacre de Thiaroye.

‘’A partir de ce massacre de masse, on pense qu’il peut y avoir plus que 70 victimes puisque les choses évoluent. On est passé d’une négation à un nombre de 35 puis à 70. La réflexion et surtout la recherche archéologique pourraient nous aider à aller au-delà de ce chiffre’’, a indiqué Ndiouga Bengha.

”Ce qui importe c’est de montrer que la quête de la vérité se poursuit sur le nombre de victimes. Mais ce qui est surtout important, c’est de comprendre que les citoyens français étaient épargnés par ce massacre”, a-t-il relevé.

‘’Les Africains sujets français ont, au-delà de ces questions de rémunération, posé la question de leur dignité, de leur liberté, de leur émancipation’’, a ajouté M. Bengha.

Moustapha Sall, est le président de la sous- commission Fouille archéologique. Il a dirigé les opérations de fouilles test dans le cimetière de Thiaroye. Pour lui, la réponse à la question de savoir qu’est ce qui s’est passé ‘’se trouve dans le sol parce que tout a été enterré’’.

FD/MTN