Hôpital Mame-Abdoul-Aziz-Sy : la section SAMES déplore une situation ‘’alarmante’’, le directeur annonce plusieurs initiatives
Hôpital Mame-Abdoul-Aziz-Sy : la section SAMES déplore une situation ‘’alarmante’’, le directeur annonce plusieurs initiatives

SENEGAL-SANTE-TRAVAIL

Tivaouane, 28 juil (APS) – Le médecin orthopédiste Maïmouna Ndiaye, déléguée départementale du Syndicat autonome des médecins du Sénégal (SAMES) à Tivaouane (ouest), a jugé alarmante la situation de l’hôpital Mame-Abdoul-Aziz-Sy, dont le directeur annonce plusieurs initiatives visant à améliorer les conditions de travail et à moderniser les infrastructures.

Dans un entretien accordé à l’APS, cette spécialiste de l’orthopédie et de la traumatologue s’est alarmée de l’‘’insécurité’’, de la ‘’surcharge de travail’’ et du ‘’manque de moyens’’ auxquels sont confrontés les travailleurs de cet établissement de santé.

Elle qualifie de catastrophique l’environnement dans lequel travaillent ses agents.

‘’Les normes ne sont pas respectées, les conditions de travail sont précaires, l’insécurité est quotidienne’’, a signalé Maïmouna Ndiaye.

Le personnel de cet hôpital public est jugé responsable de cette situation et ‘’régulièrement pris pour cible par les patients ou leurs accompagnants’’, a-t-elle dit.

Des difficultés ‘’injustement imputées’’ au personnel médical

Les travailleurs de l’établissement de santé sont souvent la cible d’‘’agressions verbales et parfois physiques’’, selon cette militante du SAMES.

La climatisation de l’hôpital fait défaut, les lits sont inconfortables, les moustiques prolifèrent, les soins administrés aux patients connaissent des lenteurs, a-t-elle affirmé, estimant que le personnel médical est ‘’injustement’’ tenu responsable de cette situation.

‘’Les malades et ceux qui les accompagnent s’en prennent aux soignants pour des manquements’’ dont ils ne sont pas responsables, s’est indignée Mme Ndiaye.

Des démarches ont été entreprises depuis un an auprès des autorités, le préfet de Tivaouane surtout, en vue de la construction d’un poste de police devant l’hôpital, a-t-elle rappelé.

‘’À ce jour, il n’y a ni poste de police ni policier. Nous travaillons dans une insécurité permanente’’, se désole le médecin, estimant que le personnel préposé à la sécurité du corps médical et des patients n’est ‘’pas en mesure d’assurer efficacement [leur] protection’’.

L’hôpital Mame-Abdoul-Aziz-Sy est confronté à un manque d’infrastructures, a ajouté Maïmouna Ndiaye, relevant de ‘’graves insuffisances’’ sur des bâtiments récemment construits, dont des ‘’fosses septiques mal placées’’ et des ‘’installations électriques défectueuses’’.

Hôpital Mame-Abdoul-Aziz-Sy : la section SAMES déplore une situation ‘’alarmante’’, le directeur annonce plusieurs initiativesL’établissement de santé n’a qu’une seule salle de réanimation, laquelle n’est équipée que de trois lits, selon la syndicaliste. ‘’C’est mieux que rien, mais c’est très insuffisant pour un hôpital de cette dimension’’, a-t-elle dit.

Mme Ndiaye regrette que la salle de réanimation ne soit ‘’pas dotée d’un service de soins intensifs complet, ni d’une salle post-opératoire digne de ce nom’’.

Le personnel ne bénéficie d’aucune assistance psychologique, malgré la pression constante à laquelle il est confronté, déplore-t-elle. ‘’Il n’existe pas de cellule d’écoute, ni d’accompagnement en cas de choc ou de surcharge émotionnelle’’, a-t-elle relevé.

Cette ‘’pression’’, conjuguée au ‘’manque de reconnaissance’’ de leurs efforts, pousse les médecins à s’installer en dehors de l’hôpital, a signalé le médecin orthopédiste.

Une ‘’véritable hémorragie de compétences’’

‘’Chaque année, des spécialistes s’en vont. D’autres, qui devraient venir, ne viennent même pas à cause des conditions de travail qui existent ici’’, a poursuivi Maïmouna Ndiaye.

‘’D’autres se reconvertissent dans la gestion hospitalière ou trouvent le moyen d’aller à l’étranger’’, raconte Mme Ndiaye en parlant d’une ‘’véritable hémorragie de compétences’’.

Les discussions entretenues par le personnel et la direction de l’hôpital sont ‘’régulières mais stériles’’, affirme la syndicaliste.

‘’Chaque année, nous reprenons les mêmes revendications, les blocages restent les mêmes. On fait du surplace’’, déplore-t-elle, reconnaissant toutefois qu’il existe un cadre de concertation syndicale permettant au corps médical de discuter des revendications.

Malgré ce climat, certains employés de l’établissement de santé continuent de faire de leur mieux, selon le médecin. Mme Ndiaye cite son propre cas. Arrivée à Tivaouane, elle y a trouvé un ‘’service vide’’, qu’elle a aidé à faire fonctionner, aux côtés d’autres agents. ‘’Mais il arrive un moment où on se sent seul, épuisé, oublié’’, dit-elle amèrement, ajoutant que même l’électricité fait quelquefois défaut.

Des inquiétudes pour l’avenir des hôpitaux publics

La syndicaliste s’inquiète de la ‘’tendance des jeunes médecins sénégalais à poursuivre leur carrière à l’étranger, en France surtout, où les équivalences et les concours d’intégration sont de plus en plus accessibles’’.

‘’Si rien ne change, dans trois à cinq ans, le Sénégal pourrait faire face à une pénurie grave de spécialistes’’, a prévenu le médecin.

Sans des investissements massifs, sans le respect des normes hospitalières et une bonne administration du personnel de santé, les hôpitaux publics sénégalais pourraient être victimes d’une asphyxie dans quelques années, selon Maïmouna Ndiaye.

Interpellé sur les difficultés soulevées par la syndicaliste, le directeur de l’hôpital Mame-Abdoul-Aziz-Sy, Yoro Diagne, assure que plusieurs initiatives ont été prises pour améliorer les conditions de travail des employés, renforcer la sécurité de l’établissement et moderniser les infrastructures.

L’hôpital va bientôt disposer d’un poste de police, a-t-il promis.

La réhabilitation de l’hôpital est en cours, le dialogue social est ‘’institutionnalisé’’, selon son directeur

M. Diagne a annoncé un ‘’réaménagement’’ de la façade de l’établissement de santé. Cette initiative prend en compte la fluidité de la circulation des véhicules et du personnel à l’intérieur de l’hôpital, selon lui.

L’établissement aura une enseigne lumineuse, a-t-il dit, annonçant d’autres équipements et aménagements, dont un parking destiné aux visiteurs.

Des appels d’offres en vue de la réalisation de ces ouvrages ont été lancés, selon le directeur de l’hôpital.

Concernant la vétusté de certains bâtiments et de la non-conformité de certaines installations avec les normes, il reconnaît l’ampleur des défis à relever.

‘’Ce sont de vrais problèmes, des contraintes aussi, dont nous avons hérité’’, a reconnu M. Diagne, assurant que ‘’l’État, conscient de cette situation, a prévu un vaste programme de réhabilitation de l’hôpital Mame-Abdoul-Aziz-Sy’’. ‘’Ce programme [va] répondre aux normes de qualité et de sécurité attendues.’’

Il dit avoir fait du dialogue social un pilier de sa gestion. ‘’Nous tenons des réunions trimestrielles avec les partenaires sociaux, en plus des concertations extraordinaires qui se tiennent en cas de besoin.’’

M. Diagne dit accorder des ‘’audiences’’ individuelles aux agents de l’hôpital, tous les mercredis, en vue de la prise en charge de leurs préoccupations. 

MKB/ADI/ASB/OID/ESF