Dakar, 3 mai (APS) – Située dans le quartier de Fann résidence à Dakar, ‘’Jam School 221’’ ou encore ‘’Jigeeni academy music School’’, l’école de musique spécialement dédiée aux femmes dénommée a officiellement ouvert ses portes, le 20 février dernier.

Le projet a été porté depuis 2002 par l’entrepreneur culturel Samba Diaité, qui ambitionne de positionner la femme instrumentiste dans l’écosystème de la musique sénégalaise voire africaine.

Par ailleurs manager de l’orchestre “Jigeen ñi”, l’homme a voulu matérialiser sa foi dans le potentiel des femmes par le biais de cet établissement de formation musicale, qui leur est exclusivement dédié.

Sise au centre culturel turc Yunus Emre, reconnaissable à ses hauts murs blancs surplombés des drapeaux de la Turquie et du Sénégal, +Jam School 221+ compte une première promotion de 25 étudiantes venues de toute l’Afrique.

A l’intérieur, un jardin bien entretenu, orné d’un manguier et de quelques arbres moins imposants, occupe l’avant-cour. Au bout du couloir dallé qui traverse le jardin trône majestueusement une bâtisse à deux niveaux aux traits sobres, peints en blanc et vert. Au rez-de-chaussée, dans une grande salle dont la baie vitrée offre une vue imprenable sur la cour arrière et la piscine, des sièges sont disposés en rangées devant un petit tableau d’art posé sur un chevalet. C’est dans ce cadre convivial que se déroulent les cours de ‘’Jam school 221’’ (Jegeeni academy music school).

‘’Le démarrage des activités pédagogiques de l’école est l’aboutissement d’un travail de longue haleine’’, lâche d’emblée le directeur Samba Diaite.

Les enseignements dispensés à ‘’Jigeeni academy music School’’ sont, entre autres, le solfège, l’écriture et la lecture musicale, le chant, les instruments modernes comme la guitare, le piano, ceux traditionnels comme la kora.

La plupart du corps enseignant vient de l’École nationale des arts (Ena) qui certifie les diplômes délivrés par l’établissement.

Combattre l’absence de femmes instrumentistes dans les orchestres

Diaïté rappelle que l’idée est née en 2002, mais qu’‘’il a fallu d’abord commencer par former les formateurs et formatrices qui, à leur tour, vont assurer l’encadrement des étudiantes. Ces formations ont été organisées entre décembre et juin 2022’’.

La mise sur pied de cette école de musique pour femmes, dit-il, vise ‘’à combattre l’absence de ces dernières comme instrumentistes dans les orchestres’’.

Souvent, regrette Diaité, les femmes se tournent vers la danse ou exercent comme choristes dans les formations musicales.

C’est d’après ce constat qu’il a créé l’orchestre +Jigeen ñi+, ‘’son plus grand rêve’’, composé exclusivement de femmes : la pianiste et chef d’orchestre Khady Dieng, sa sœur ainée Aïssatou Dieng (batterie), Evora Vaz à la guitare basse, Rema Diom (soliste) et Ndèye Cissé “Yaye Fall” (percussion), toutes des autodidactes.

‘’Nombreuses sont les femmes qui veulent faire carrière dans la musique, mais sont rebutées par le regard de la société qui voit les musiciennes comme des femmes de mœurs légères’’, déplore Samba Diaité qui est également le directeur artistique du Grand théâtre Doudou Ndiaye Coumba Rose, de Dakar.

L’apprentissage pratique comme méthode d’enseignement

Pour cette première année, 65 dossiers de candidatures ont été reçus et 25 ont été retenus. Les étudiantes s’acquittent des frais d’inscription et d’une mensualité.

‘’Aucun niveau d’études n’est exigé des candidates. Nous avons plutôt mis l’accent sur les capacités musicales et les motivations parce la plupart des artistes en Afrique n’ont suivi aucune formation. Ils sont pour la plupart issus des familles de griots’’, confie Samba Diaité.

‘’Les filles sélectionnées ont déjà certaines aptitudes en musique et sont surtout passionnées par le métier’’, poursuit-il.

Il indique que les enseignements sont plus axés sur la pratique, le ‘’learning by doing’’ (l’apprentissage par la pratique).

Toutefois, il y a des cours théoriques, et les cycles de formation varient entre trois mois et deux ans.

Après les cours, toutes les étudiantes feront un stage pratique à l’orchestre “Jigeen ñi”‘, avec notamment des concerts au Grand théâtre national Doudou Ndiaye Coumba, a assuré Diaité, ce manageur culturel de 42 ans originaire de Ziguinchor (Sud).

Professeur de solfège, de chant et de technique vocale, Henri Assissé Sagna magnifie la fondation de l’école. Selon cet enseignant de l’Ena à la retraire, qui officie à ‘’Jigeeni academy music school’’, ‘’cette école de formation musicale est une aubaine pour les femmes qui veulent faire carrière dans la musique parce que bénéficiant d’une bonne formation.

‘’J’ai divisé mon cours en deux parties pour permettre aux étudiantes d’apprendre d’abord la lecture musicale, purement théorique, ensuite la technique vocale qui est pratique avec un chant folklorique peul intitulé +Tino+’’, dit-il.

Des apprenantes enthousiastes

L’étudiante Gildas Diatta, choriste se dit très satisfaite des modules enseignés.

‘’En plus des cours sur les instruments, on nous apprend le solfège, l’écriture et la lecture musicale, c’est super !’’, s’exclame-t-elle réjouie.

Cette pensionnaire de la chorale Sainte Thérèse de Grand-Dakar est convaincue qu’au bout de la formation, elle sera une musicienne polyvalente qui, en plus du chant, sera en mesure de maîtriser au moins un instrument.

Sarah Ngona, de nationalité congolaise, est venue, dit-elle, approfondir ses connaissances en musique, perfectionner sa voix et apprendre à jouer du piano, son instrument de prédilection.

”J’espère sortir d’ici avec une bonne base en musique tant en théorie qu’en pratique” ajoutant, tout en magnifiant la qualité des enseignements.

Le reggae man Iba Gaye Massar, membre du Conseil d’administration de la Société sénégalaise du droit d’auteur (Sodav), salue l’initiative de Samba Diaité d’avoir créé l’orchestre “Jigeen ñi” et aujourd’hui ‘’Jam School 221’’.

La formation va permettre aux femmes, selon lui, au-delà du chant et de la danse, où elles se cantonnent souvent, d’intégrer le domaine, non moins important, des instruments musicaux.

”Je suis frappé par l’enthousiasme de ces étudiantes qui apprennent vite”, souligne Iba Gaye Massar, formateur en guitare, par ailleurs vice-président de l’Association des métiers de la musique du Sénégal (AMS).

MYK/FKS/ABB

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