Makhtar Seck ou l’engagement d’un jeune entrepreneur agricole

SENEGAL-AGRICULTURE-PROFIL

+++ Par Cheikh Gawane Diop +++

Bari Diam (Saint-Louis), 15 mars (APS) – Makhtar Seck ne se cache pas derrière son petit doigt pour afficher son engagement et surtout sa motivation dans le secteur de l’entreprenariat agricole où il évolue depuis quelques années. Du riz paddy au blé en passant par le riz blanc, le jeune entrepreneur agricole entend plus que jamais faire carrière dans cette activité.

Âgé de 30 ans et plus connu sous le nom de ‘’Makhtar Ceeb’’ (ceeb : riz en français), l’entrepreneur agricole a une histoire avec le riz depuis qu’il a obtenu son baccalauréat en 2016.

‘’Je suis plus connu sous le nom de « Makhtar Ceeb ». Et pourquoi « Makhtar Ceeb », je vais vous dire cela. Tout a commencé au lendemain de mon baccalauréat. Je ne savais rien du riz. Si j’en savais quelque chose, c’est autour du bol [élément de vaisselle] pour manger. Donc au lendemain de mon bac, je suis allé à la rizerie Syka industrie d’un grand-frère’’, a-t-il lancé soulignant que cette rizerie se situe à un kilmomètre de Bari Diam, une localité de l’arrondissement de Ndiaye (Ross-Béthio).

De l’avis de Makhtar Seck, ce passage à cette industrie rizière l’a impressionné. Bien plus que motivé, il s’y met.

‘’Je voyais le riz paddy et ensuite le riz blanc. Donc arrivé à l’usine, je suis un peu déboussolé parce que c’est sur une chaîne de 12 hectares. Ensuite je suis resté 2 heures de temps à voir la transformation du riz. Et ces 2 heures de temps-là m’ont beaucoup impressionné. C’est la motivation et la passion qui m’ont poussé à rentrer dedans’’, confesse-t-il dans un entretien avec l’APS.

Makhtar dit avoir abandonné son projet d’études au Canada pour rester au pays tout en cherchant de quoi mettre dans la poche.

‘’J’étais prêt à faire mes papiers pour étudier au Canada. Donc j’ai tout laissé. Ensuite, une semaine après le patron m’a donné un sachet rempli d’argent pour le verser à la CNCAS [Caisse nationale de crédit agricole du Sénégal] devenue La Banque agricole (LBA). Je me suis dit si je vais partir au Canada, c’est pour chercher de l’argent et alors qu’ici y a de l’argent. Donc tout a commencé là-bas et ensuite j’ai travaillé là-bas non pas comme un employé mais en tant que stagiaire’’, se souvient-il.

Une mini rizerie installée depuis 2016

Orienté à l’Université Gaston-Berger (UGB) de Saint-Louis peu après l’obtention du bac, Makhtar préfère s’inscrire à l’ISEG pour suivre des enseignements en ligne où il dit avoir décroché sa licence en Marketing et Communication, une manière pour lui de mener à bien son activité parallèle.

‘’Ensuite on m’a orienté à l’UGB [Université Gaston Berger]. J’ai quitté l’UGB pour aller directement à l’ISEG pour avoir plus de temps à travailler là-bas’’, explique-t-il.

Et voilà deux ans après, dit-il, l’usine est tombée en panne et j’avais des clients aussi. Les clients faisaient leur commande tout le temps. Ensuite, j’ai eu l’idée d’acheter le riz dans les autres usines à 270 000 francs CFA et je le revends à 290 000 francs CFA. Donc chaque tonne, je gagnais 20 000 francs CFA. Imaginez avec 40 tonnes revendues, vous gagnez 800 000 francs CFA par camion.

”Donc, souligne-t-il, c’est ce qui m’a permis d’acheter un petit terrain là-bas et ensuite j’ai commencé à construire une mini rizerie décortiqueur, blanchisseur, etc. Et voilà après ça a grandi. L’engagement et la motivation m’ont conduit jusque-là c’est-à-dire aujourd’hui spécialisé dans transformation et la commercialisation du riz local sénégalais.”

Le blé, ‘’deuxième pétrole’’

Après le riz, Makhtar, en bon entrepreneur agricole, a décidé de se lancer dans la culture d’une autre céréale qu’il considère aujourd’hui comme le ‘’deuxième pétrole’’, le blé.

‘’Mais maintenant avec le blé, j’aspire à créer d’autres activités parce que le blé c’est le « deuxième pétrole ». Tout le monde le sait. On ne peut pas rester une seule journée sans manger le blé, c’est impossible. Et ce qu’on importe par rapport à l’extérieur c’est beaucoup’’, s’exclame-t-il.

”Je suis tombé amoureux du blé. Au début, je ne connaissais rien du blé. J’avais suivi à la RTS [Radiodiffusion télévision sénégalaise, publique] l’année passée un reportage sur des champs récoltés à Ndioum”, se remémore-t-il.

Le lendemain, poursuit-il, ”je me suis rendu à l’ISRA [Institut sénégalais de recherches agricoles] pour avoir des informations. Et je suis tombé sur le professeur Amadou Tidiane Sall qui m’a conduit à cela et on a fait 2 jours de formation. Et l’ISRA en partenariat avec l’ADEPME et EUCORD a fait une sélection pour la production du blé et j’en faisais partie.”

Pour lui, l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire va certainement réduire le taux de chômage et la pratique d’émigration irrégulière. Il invite les jeunes à pratiquer l’agriculture dans leurs localités d’origine, un retour à la source.

‘’On a un nouveau gouvernement, il faudra le travail, l’engagement et la persévérance. Et il faut que les jeunes qui sont dans les villes reviennent dans leurs localités pour pratiquer l’agriculture. C’est mieux au moins pour contribuer à l’autosuffisance alimentaire et aussi pour réduire le taux de chômage mais également l’émigration clandestine donc c’est important’’, a-t-il préconisé.

Il a ajouté : ”On a tout ce qu’il nous faut pour cultiver le blé, on a la terre, on a l’eau et ce qui est le plus important, on a le soleil. Donc il ne reste qu’à travailler. Il faut juste dire que l’État doit nous accompagner dans notre projet de créer la filière blé et ensuite nous donner les moyens pour qu’on continue à travailler”.

Actuellement producteur de blé dans un champ-école de Bari Diam, dans le cadre d’une phase d’expérimentation de la production de la filière blé, Makhtar rêve grand. ‘’C’est la première fois que je fais la production de blé. On a 35 hectares qui nous attendent et pourquoi ne pas faire 10 hectares l’année prochaine pour influencer les autres producteurs de la zone. On est en phase test et d’après ce que j’ai vu, on l’a réussie’’, dit-il soulignant que son champ-école sera récolté au plus tard d’ici la semaine prochaine.

Il a également demandé un accompagnement de la SAED [Société d’aménagement et d’exploitation des terres du delta du fleuve Sénégal et des vallées du fleuve Sénégal et de la Falémé] pour pouvoir augmenter leur capacité de producteur de blé dans cette partie de la vallée.

Dans son champ-école situé à Bari Diam, la variété de blé dur autrement appelée ‘’Haby’’ est en train d’être expérimentée. Ce natif de Saint-Louis bénéficie d’un accompagnement dans le cadre du projet Blé irrigué Sénégal (BIS) mis en place par la Coopérative européenne pour le développement rural (EUCORD).

CGD/AMD/ADC

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