SENEGAL-TECNOLOGIE-NUMERIQUE
Dakar, 15 avr (APS) – La cybersécurité au Sénégal est loin d’être à la hauteur des défis actuels, ”avec une gouvernance fragmentée et inefficace”, alerte Daouda Sow, directeur général de Tex Groupe, une entreprise spécialisée dans la sécurité numérique.
”Avec une gouvernance fragmentée et inefficace, le pays accuse un retard significatif par rapport à ses voisins de la sous-région, à l’image de la Côte d’Ivoire qui a mis en place une Agence nationale de cyber sécurité ou du Maroc où la question est traitée par les services de renseignement”, a-t-il déclaré dans un entretien avec l’APS.
Pour Daouda Sow, l’absence d’une stratégie coordonnée est l’un des principaux freins à une cyber sécurité efficace au Sénégal. ”Il n’y a pas de feuille de route claire, ni de responsabilités définies”, regrette-t-il, citant la dispersion des efforts entre plusieurs entités.
La cybercriminalité est ”une menace grandissante qui ne cesse de croître et impacte aussi bien les entreprises privées que les institutions publiques”, a-t-il relevé. ”Il ne se passe pas un jour sans qu’une entité ne soit victime d’une attaque”, prévient l’expert.
”Les banques figurent parmi les cibles privilégiées, mais les infrastructures stratégiques, telles que les réseaux énergétiques ou les systèmes d’approvisionnement en eau, sont également vulnérables”, a-t-il précisé. Fort de ce contact, Daouda Sow est d’avis qu’il urge pour l’Etat de mettre en place un Centre de traitement des incidents informatique (CERT).
”Le Sénégal demeure l’un des rares pays de la région à ne pas disposer d’un CERT (Centre de traitement des incidents informatiques), un instrument essentiel pour la coordination des réponses aux cyberattaques”, a-t-il renseigné, poursuivant que ”sans CERT, nous sommes isolés et incapables de réagir efficacement aux menaces”.
L’expert a également préconisé de revoir la stratégie nationale de cyber sécurité en 2022, arguant que depuis son adoption en 2022, celle-ci n’a que très peu évolué depuis. Or, “une stratégie obsolète face à des menaces en perpétuelle mutation est inefficace”, insiste-t-il, appelant à sa mise à jour et à son application rigoureuse.
Former pour mieux se protéger
”L’un des axes prioritaires de la cyber sécurité repose sur le capital humain. La technologie seule ne suffit pas. Sans compétences humaines qualifiées, elle est inutile”, avertit Daouda Sow. Il plaide ainsi pour une ”refonte des cursus de formation” afin de répondre aux ”besoins du marché et de créer des opportunités d’emploi pour les jeunes sénégalais”.
Saluant le développement d’infrastructures numériques locales, à l’instar du Datacenter de Diamniadio qui constitue ”une avancée vers la souveraineté numérique du pays”, Daouda Sow se pose toutefois des questions sur la gestion et la sécurisation de ces infrastructures. ”Sont-elles exploitées par des acteurs locaux ou déléguées à des entreprises étrangères?” La cyber sécurité y est-elle intégrée en amont ?’’, s’interroge-t-il.
L’expert appelle par ailleurs à une coopération élargie au niveau international. Les cybers attaquants opèrent sans frontières. Nous ne pouvons pas nous contenter d’une réponse nationale”, a-t-il fait valoir
Selon lui, ”une meilleure collaboration avec les CERT étrangers et les institutions internationales permettrait un partage d’informations et une anticipation plus efficace des menaces”.
Face à ces constats alarmants, Daouda Sow insiste sur l’urgence pour le Sénégal de ”renforcer sa stratégie de cyber sécurité, en misant sur la formation, la technologie et une gouvernance claire’’. ”Les cybercriminels, eux, ne perdent pas de temps. Il est plus que jamais impératif d’agir”, conclut-il.
MK/SBS/ADC