Bandia (Mbour), 17 déc (APS) – Travailler comme guide à la réserve animalière de Bandia représente plus qu’un Safari pour Ibrahima Sow, qui a réussi, en 26 ans, à se forger un caractère humaniste à force de rencontrer un public multiculturel en faisant preuve de patience et tolérance dans l’exercice de son métier.Il avait la trentaine à son arrivée pour la première fois à la réserve de Bandia en 1997. Et rien ne prédestinait au natif de Saint-Louis une vie avec les animaux sauvages d’autant plus que son rêve le plus fou était d’émigrer en Europe.“Les démarches étaient déjà entamées, tout était prêt pour partir mais à la dernière minute nous avons eu des contretemps. Ce qui a fait que mon projet de voyager n’a jamais abouti’’, s’est remémoré Ibrahima Sow, aujourd’hui âgé de 57 ans.Après des tentatives inabouties et des petits boulots dans le batiment et l’horticulture entre saint-Louis et Thiès, celui qui a fréquenté l’école coranique avant d’arrêter ses études au cycle secondaire classique a fini par croire que son destin de réussite était de rester au bercail.En philosophe, Ibrahima Sow pense même qu’il a effectué beaucoup de voyages sans jamais sortir du Sénégal. En ce sens que presque toutes les cultures, toutes les personnalités et nationalités viennent vers lui pour découvrir les richesses fauniques, floristiques dont regorge la réserve de Bandia.Une fois que ce rêve d’émigrer s’est éloigné de ses perspectives, Ibrahima Sow a été présenté à un des associés belges de la réserve à la recherche d’un guide. ”Je devais faire un test de 3 mois avant de commencer à travailler. Par la suite, j’ai subi une formation sur le tas sur les rouages du métier’’, renseigne-t-il.Depuis, il a réussi se faire une place dans ce métier contraignant et qui nécessite beaucoup de tolérance et de patience. Des qualités qu’il s’est forgées au fil des années au contact des visiteurs.“Ce métier m’a appris à être tolérant et à respecter les gens dans leur croyance et leur conviction”, informe Sow, premier guide à la réserve de Bandia.Il faut, selon lui, outre la culture générale, être bilingue, avoir des compétences requises pour être un bon guide animalier. Surtout quand on travaille dans environnement accueillant un public multiculturel et multilingue.Ibrahima Sow renseigne également que son métier fait appelle à beaucoup de patience, afin d’être en mesure de “déceler très tôt les motifs qui poussent chaque visiteur à faire du safari. Car un objectif, il y’en a toujours, mais on n’est pas censé le demander de prime abord”, précise t-il.Le guide animalier, presque un psychologueSelon lui, “il y a des visiteurs qui vous parlent de politique, d’autres de la religion, de la culture et d’autres veulent en savoir plus sur la société sénégalaise”. Donc les sensibilités sont différentes, d’où ”la nécessité d’être cultivé mais aussi très patient”, a poursuivi celui que ses collègues appellent communément “Sécu”, diminutif de sécurité, car Ibrahima a la réputation d’être ”une personne fiable et discrète”.Il affirme également qu’il lui arrivait d’accueillir des visiteurs qui viennent avec certains clichés sur l’Afrique. ”Ils s’ouvrent à nous et nous racontent leur sensibilité, leur parcours, et le guide à son tour, doit savoir comment déconstruire ces clichés et mettre en avant les valeurs et les cultures africaines”, fait-il observer.Ibrahima Sow ne manque jamais de révéler le caractère “humain et humaniste” qu’offrent la faune et la flore. En cela, ajoute-t-il, “les comportements et les échanges des uns et des autres peuvent très vite se transformer en une réflexion sur des sujets existentiels”.Mais le guide de 57 ans insiste toujours sur la patience qu’il faut développer à tout point de vue. “Le premier conseil que je donnerai à un jeune guide c’est d’être patient et tolérant car dans le métier, autant on peut rencontrer des gens disciplinés courtois et polis, autant on rencontre des gens invivables avec des comportements peu adéquats”. D’où la nécessité, ajoute-t-il, “d’être toujours patient et tolérant, mais aussi courageux”.Selon Ibrahima, seule la passion peut triompher contre ce qu’il appelle “les aléas du métier” liés notamment à son caractère saisonnier et qui ont pour conséquence une baisse des revenus des guides. Il faisait allusion à la crise sanitaire de la Covid-19 ou les périodes électorales qui font baisser le nombre de visiteurs sur le site.Aujourd’hui, l’ancien candidat à l’émigration se dit fier du choix et du parcours qu’il a réalisé sur place.“Nous nous sommes battus pour que la réserve soit ce qu’elle est aujourd’hui. Ce n’était pas facile au début car il fallait réussir la prouesse de convaincre les visiteurs à revenir et à faire venir d’autres personnes. D’autant plus qu’il n’y avait pas beaucoup d’animaux à l’époque. Donc nous avons beaucoup participé au développement de la réserve”, se félicite-t-il.Presque autodidacte en langues étrangères, ce père de famille parle parfaitement le français en plus de l’anglais.“Je ne comptais que sur ma propre curiosité pour approfondir mes connaissances en langues. J’achetais souvent des livres et je lisais beaucoup pour me cultiver, je me débrouille aussi très bien en arabe et en allemand”, ajoute-t-il, le sourire au coin.Pour lui, il est important de mettre à jour ses connaissances dans beaucoup de domaines pour réussir dans ce métier, qui par endroits, vous amène à agir “comme des psychologues lorsqu’on est au contact de certains visiteurs”.Ce que semble confirmer son collègue Amadou Tidiane Niane quand il explique que le guide doit être habilité à “déceler dès l’accueil des visiteurs leur intérêt”. Il trouve que cet aspect humain de la visite reste le plus difficile à déceler, mais une fois qu’on y arrive “c’est le plus beau moment” du Safari .MF/SMD/OID
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