SENEGAL-RELIGIONS-COMMEMORATION
Par Momar Khoulé Ba
Ndiassane, 14 sept (APS) – L’édition 2025 du Gamou de Ndiassane a vécu. Ce ‘’moment de ravivement de la lumière muhammadienne’’ a enregistré la participation, comme d’habitude, de fidèles venus du Sénégal et d’autres pays d’Afrique de l’Ouest. C’était aussi l’occasion, pour le khalife général des khadres, de lancer un appel à la renaissance morale et à la cohésion. Retour sur les à-côtés de cette manifestation religieuse annuelle.
A – Amour du prophète
Le Gamou, c’est d’abord la célébration de l’amour indéfectible envers Mouhammad, prophète de l’islam, serviteur de Dieu et le meilleur de ses créatures, selon l’islam. Cet amour sincère ouvre les portes de la sainteté, enseignait Cheikh Bouh Kounta. C’est ce lien affectif qui fait vibrer Ndiassane, nuit après nuit.
B – Bassirou Diomaye Faye
Le chef de l’État, Bassirou Diomaye Faye, était représenté à la cérémonie officielle du Gamou de Ndiassane par le ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Élevage, Mabouba Diagne. Ce dernier, porteur du message du président de la République, a salué ‘’la contribution des confréries religieuses à la paix sociale, à l’éducation et à la transmission des valeurs’’. Au nom du gouvernement, il a aussi demandé des prières pour la réussite du tandem Ousmane Sonko-Bassirou Diomaye Faye et une campagne agricole concluante, gage de souveraineté alimentaire et de stabilité économique.
C – Cheikh Bouh Kounta
Fondateur de Ndiassane en 1883, héritier de la qadiriyya, Cheikh Bouh Kounta a enraciné la voie khadre au Sénégal. Sa sagesse et sa vision ont fait de Ndiassane un phare spirituel dont le rayonnement dépasse les frontières. Cheikh Bouh Kounta, à l’image de ses ascendants, était un érudit de l’islam, un grand homme de Dieu. L’influence de ce véritable pasteur d’âmes s’est étendue à la région ouest-africaine, déjà avant son rappel à Dieu en 1914.
D – Dévotion
Les retrouvailles des fidèles pour célébrer le Gamou de Ndiassane traduisent la marque d’une dévotion toujours renouvelée, dans une volonté de purifier sans cesse les intentions de prière. De cette manière, Ndiassane continue de représenter, pour des millions de fidèles, une école de piété où chacun cherche la proximité avec Dieu dans la sincérité de ses prières.
E – Enseignement
Chaque édition du Gamou de Ndiassane rappelle la vocation éducative du soufisme : apprendre à vivre dans la droiture, à servir son prochain et à garder la mémoire des maîtres khadres. Ndiassane continue de s’inscrire dans cette tradition que partagent les confréries musulmanes sénégalaises dans leur diversité.
F – Fidélité
Fidélité au prophète, à Cheikh Bouh Kounta, fidélité à la voie spirituelle reçue des ancêtres. Cette constance est le ciment de Ndiassane, un centre religieux de référence, dont la contribution à l’intégration régionale se mesure à la présence, au Gamou, de milliers de fidèles ivoiriens, maliens et guinéens. Ils contribuent ainsi, sous cet angle, au raffermissement des relations entre le Sénégal et ses voisins et à une meilleure compréhension entre les peuples.
G – Gamou
En wolof, le mot ‘’gàmmu’’ désigne le Mawlid, la célébration de l’anniversaire de la naissance du prophète Mouhammad. Mais à Ndiassane, ce mot est devenu synonyme de fraternité, de foi partagée et de retour aux sources. C’est que les autorités religieuses de Ndiassane ont saisi toute la portée et l’universalité du message de l’islam, qui transcende les pays et les âges, mais surtout ne tient compte des conditions des uns et des autres, l’essentiel étant ce lien intime qui relie directement au Créateur.
H – Hospitalité
Le ‘’terànga’’, traduction de l’hospitalité à la manière sénégalaise, prend tout son sens à l’occasion du Gamou de Ndiassane. Les familles de cette cité religieuse accueillent pèlerins et visiteurs, auxquels ils offrent hébergement et nourriture. Cette générosité se veut un prolongement de la baraka de la famille Al Kountiyou et contribue à son rayonnement.
I – Invocation
Le Gamou, comme on peut l’imaginer, est un moment de ferveur renouvelée. Une nuit au cours de laquelle les ‘’zikr’’ emplissent le ciel de Ndiassane, au rythme des va-et-vient des pèlerins. Des invocations nourries favorisant un rapprochement avec Dieu en apaisant les âmes.
J – Justice divine
La justice divine a été un thème récurrent des prêches prononcés pendant le Gamou. Un rappel que nul n’échappe à la justice de Dieu. Un message bienvenu en ces temps troublés qui favorisent la loi du plus fort et l’indifférence vis-à-vis de la situation des couches les plus modestes. Dans un tel contexte, la Justice divine appelle à la droiture dans les affaires, à l’équité dans les relations et à la sincérité dans la foi.
K – Khadres
Disciples de la qadiriyya, héritiers de Cheikh Abdoul Khadre Dieylani, les fidèles khadres incarnent une voie d’humilité, de service et de recherche spirituelle. Ndiassane en est le foyer africain le plus vibrant.
L – Lumière
La naissance du prophète est célébrée comme une lumière qui dissipe les ténèbres. Les chants religieux du Gamou sont là pour rappeler que ‘’le prophète est une lampe éclatante’’.
M – Mausolées
Les mausolées de Cheikh Bouh Kounta et de ses héritiers rappellent la continuité de la baraka dans la famille kountienne. Ce lieu de mémoire, de bénédiction et de recueillement est assailli par les fidèles pendant le Gamou. Ils ont chacun des demandes particulières à formuler, des choses intimes à confier dans la prière et le même espoir de voir leurs vœux se réaliser.
N – Ndiassane
Cité spirituelle nichée dans le cœur du Cayor, Ndiassane a été fondée dans un contexte de résistance morale et religieuse au XIXᵉ siècle. La cité de Cheikh Bouh Kounta, avec le même engagement et le même rayonnement, continue de maintenir haut le flambeau de l’islam. Une tradition qui se maintient dans la fidélité et la constance dans les principes et valeurs premiers de l’islam.
O – Organisation
La réussite du Gamou repose sur une mobilisation collective portée par les comités locaux bénéficiant de l’engagement de volontaires les uns plus enthousiastes que les autres. L’appui logistique de l’État vient apporter une caution nationale et une touche technique à l’organisation d’un évènement dont l’audience dépasse très largement les frontières sénégalaises.
P – Parrainage spirituel
Chaque édition du Gamou de Ndiassane est placée sous l’égide d’une autorité kountienne, ce qui garantit la transmission authentique de la tradition et oriente les fidèles. Cela dénote en même temps de tout le prestige de cette très ancienne lignée de saints-mystiques-musulmans. Les Kounta représentent à la fois une lignée familiale et une chaîne de transmission mystique, qui donne tout son sens au soufisme confrérique.
Q – Quiétude
Le Gamou de Ndiassane se distingue par une impression de calme, qui donne toute sa force spirituelle à cet évènement. Comme si la cité de Cheikh Bouh Kounta réprouvait plus que tout cet emballement bien caractéristique des choses mondaines. Cette atmosphère de paix et ce silence habité sont la véritable clé de compréhension d’une nuit où les cœurs trouvent repos dans la pleine confiance de Dieu, maître des destins et de tous les univers, connus, cachés ou non encore révélés.
R – Recueillement
Le Gamou de Ndiassane est une halte spirituelle où le monde matériel s’efface devant l’idéal ultime, la quête de l’absolu. Les pèlerins viennent s’asseoir, méditer, réciter et se recueillir pour se rapprocher davantage de Dieu, dans une sorte d’introspection dont le but non avoué est de transformer chaque fidèle en un homme meilleur et un citoyen de plus en conscient de ses droits et devoirs et de sa dette à l’endroit de la communauté et de ses semblables. En définitive, le Gamou, c’est une quête d’humanité.
S – Solidarité
Au-delà des prières, le Gamou est un moment de partage : dons alimentaires, repas collectifs, assistance des pauvres et de ceux qui fréquentent les ‘’daara’’ (écoles coraniques). Cette dimension sociale vient rappeler que la religion, bien loin de certaines idées, doit s’incarner dans la réalité. C’est le message de la plupart des maîtres soufis sénégalais : avoir constamment conscience que la mort est la destinée ultime des hommes, mais ne rien s’interdire qui puisse contribuer à rendre le monde meilleur chaque jour. Et le faire avec toute la détermination que suggère la foi.
T – Transmission
À Ndiassane, les aînés font leur possible pour transmettre aux plus jeunes la mémoire de Cheikh Bouh Kounta, les récits des maîtres, les chants et les pratiques. La tradition reste de cette manière vivante et féconde. C’est aussi la voie d’un futur inventé, inspiré par la profonde connaissance du passé et de son cours toujours plein d’enseignement pour les hommes, les meilleurs des hommes notamment.
U – Unité
Toutes les catégories sociales, toutes les origines, toutes les générations se retrouvent au Gamou de Ndiassane. Un moment privilégié pendant lequel les clivages s’estompent pour que les cœurs puissent mieux se réunir autour de l’amour du prophète, la référence ultime.
V – Visites
Des pèlerins venus du Sénégal, des pays de la région et même de la diaspora font de Ndiassane un carrefour spirituel et une terre de convergence. Signe que la religion est la meilleure manière pour dépasser les différences et remédier aux divisions. Tout ce que peinent à comprendre tous ceux qui s’évertuent à en faire un instrument de division.
W – Wird
Les prières quotidiennes prescrites par les maîtres khadres, comme dans le cas d’autres confréries musulmanes sénégalaises, sont le viatique le plus précieux pour les fidèles présents au Gamou. La récitation constante de ces ‘’wird’’ structure la vie spirituelle et rythme la quête de nombreuses personnes qui trouvent dans le Gamou une opportunité unique de se transformer et de s’élever spirituellement.
X – Xam-xam (savoir)
Le Gamou est aussi une université populaire ponctuée par des sermons, des causeries, des récitations du saint Coran et autres panégyriques. C’est que la quête de savoir, comme on le sait, nourrit la foi, l’entretient et la raffermit. Ne pas oublier que l’islam et son prophète considèrent le savoir comme un bien parmi les plus précieux pour le musulman.
Y – Yërmànde (compassion)
Cheikh Bouh Kounta enseignait que l’amour du prophète se traduit par la compassion envers les autres. Au Gamou, cette valeur prend chair dans les gestes de solidarité.
Z – Zikr
Le ‘’zikr’’, répétition du nom divin et des louanges envers le Créateur, unit les voix et les cœurs. C’est l’âme du Gamou, une vibration collective qui élève vers Dieu.
MKB/BK/ESF

