SENEGAL-SOCIETE-PROFIL
Dakar, 4 déc (APS) – Famara Ibrahima Cissé est ingénieur financier de formation et chercheur en philosophie de l’économie. Davantage connu comme un acteur communautaire, il s’est imposé au fil des années comme l’une des voix les plus engagées au Sénégal quand il s’agit de défendre les usagers des institutions financières.
Tout son engagement ou presque tourne autour de questions relatives à l’éthique bancaire et la transparence dans les rapports entre les banques et leurs clients. Et cela passe, selon lui par l’existence de lois protectrices des droits des usagers des services bancaires.
La Journée internationale des banques, célébrée ce 4 décembre, offre l’opportunité de lever le voile sur son parcours et ses prises de position. Par ses différentes actions de terrain et ses sorties dans la presse, Famara Cissé, montre un engagement constant en faveur de banques plus responsables, respectueuses des droits des usagers, et actrices du développement économique et social. Ce combat, tel un sacerdoce, le président de l’Association des clients et sociétaires des institutions financières (ACSIF) entend le poursuivre contre vents et marrées.
“Nous nous sommes dit qu’individuellement, nous ne pouvons pas régler ce problème pour le respect des droits des usagers des services bancaires, mais si nous arrivons à nous muer en entité, nous arriverons peut-être à renverser la tendance et contribuer à leur bien-être”, explique d’emblée Famara Ibrahima Cissé quand il a été interpellé sur les raisons de son engagement dans ce domaine.
Il faisait notamment allusion aux procédures judiciaires pouvant opposer les banques et certains de leurs clients.
En 2024 déjà, il a tenté de devenir député afin de bénéficier de la tribune parlementaire qui lui donnerait une plus grande légitimité à parler de ces questions.
Bine qu’ayant pas obtenu l’onction des électeurs, l’homme n’en a pas démordu pour poursuivre son engagement en faveur de la lutte contre les ”abus” des institutions bancaires. A la tête de l’ACSIF, il s’est ainsi imposé comme un porte-voix influent des clients, contribuant à la résolution de leurs difficultés et à l’adoption de lois plus protectrices des usagers.
Ses actions ne sont pas sans effet sur un système très policé dont les acteurs se caractérisent par leur discrétion et le respect qu’ils vouent à certains usages et convenances, à la limite du culte du secret.
Renforcer l’équité pour dissuader les pratiques abusives
Convaincu de l’importance centrale des banques dans le financement de l’économie réelle, Famara Cissé plaide pour des “banques à visage humain”, au service des entreprises comme des particuliers.
“La banque est au cœur de l’économie et favorise le développement des pays”, concède-t-il, mais il y a aussi nécessité pour le secteur bancaire d’être plus “transparent, respectueux des droits des clients et davantage orienté vers l’investissement productif plutôt que vers la seule logique commerciale”.
Pour le président de l’ACSIF, l’assainissement du secteur bancaire passe nécessairement par un cadre juridique fort. Il défend notamment l’adoption d’une loi sur le surendettement, afin de protéger les travailleurs fragilisés par des crédits qu’il juge excessifs. Il préconise aussi un dispositif légal de mobilité bancaire pour éviter que le changement de banque ne soit un parcours coûteux et dissuasif pour les clients.
“La mobilité bancaire est une problématique au Sénégal parce que tout simplement, pour changer de banque, c’est la croix et la bannière”, constate-t-il, déplorant “un vide juridique dans notre arsenal de lois”.
“Pour changer de banque, le client est obligé de payer une somme faramineuse de 200 000 francs CFA en passant par l’attestation d’engagement, l’attestation de non-engagement et les frais de clôture de compte”, énumère-t-il. Il s’agit, selon lui, de “montants énormes que les clients perdent gratuitement”.
À cela s’ajoute son combat pour la mise en place d’un fonds destiné à soutenir juridiquement les usagers lorsqu’ils s’estiment lésés par une institution financière. “Beaucoup de clients perdent leurs droits simplement parce qu’ils ne peuvent pas supporter les frais d’une procédure judiciaire”, regrette-t-il, estimant qu’un accompagnement juridique renforcerait l’équité et dissuaderait les pratiques abusives.
Au sein de l’ACSIF, qu’il présente comme “une force de propositions, de dénonciation et de défense des usagers”, Famara Ibrahima Cissé multiplie les actions de sensibilisation pour renforcer la bancarisation et l’inclusion financière des populations longtemps laissées en rade du système bancaire classique.
Il rappelle ainsi que les mesures de gratuité portant sur 19 services financiers, adoptées par la Banque centrale depuis 2014, restent encore inégalement appliquées par certaines banques, contribuant au maintien d’un faible taux de bancarisation au Sénégal.
Pour ce défenseur infatigable de l’éthique bancaire, l’amélioration de l’accès au crédit demeure un levier indispensable pour stimuler l’emploi et créer de la richesse. Il ne manque pas de mettre en garde contre les effets du renchérissement des taux et la persistance des obstacles au financement des petites et moyennes entreprises, un enjeu majeur, selon lui, pour l’avenir économique du pays.
SMD/ASB/BK

