Dakar, 12 fév (APS) – Le montant de la dette publique du Sénégal à la fin de l’année 2023 était égal à 99,67 % du produit intérieur brut (PIB) du pays, loin des 73,6 % annoncés par le gouvernement de l’époque et des 83,7 % mentionnés dans un rapport préliminaire du ministère des Finances et du Budget en 2024, a-t-on appris, mercredi, de la Cour des comptes.

« Les travaux réalisés par la Cour [des comptes] montrent que l’encours de la dette est supérieur à celui affiché dans les documents de reddition. L’encours total de la dette de l’administration centrale budgétaire s’élève à 18.558,91 milliards de francs CFA au 31 décembre 2023 et représente 99,67 % du PIB », déclare cette institution exerçant la mission de contrôle des finances publiques.

Elle vient de publier l’« Audit du rapport sur la situation des finances publiques – Gestions de 2019 au 31 mars 2024 », à la demande des autorités qui dirigent le pays depuis 2024.

« À la fin de l’année 2023, la dette de l’État […] hors secteur parapublic était de 15.664 milliards, soit 83,7 % du PIB, alors qu’elle était annoncée à 13.772 milliards, soit 73,6 % du PIB. Il s’agit donc d’un supplément de dettes contractées et non publiées de près de 1.892 milliards, soit 10 % de plus du PIB », a indiqué le ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération, Abdourahmane Sarr, lors d’une conférence de presse donnée par le gouvernement en septembre dernier.

« En définitive, les travaux de la Cour [des comptes ]sur la situation globale des finances publiques, en particulier l’exécution du budget général et des comptes spéciaux du Trésor, ainsi que l’endettement et la trésorerie […] ont abouti aux principales constatations suivantes : tirages sur ressources extérieures supérieurs à ceux affichés dans le rapport du gouvernement (un rapport préliminaire du gouvernement dirigé par Ousmane Sonko) ; encours de la dette supérieur à celui figurant dans le rapport du gouvernement ; disponibilités du Trésor supérieures à celles indiquées » par le ministère des Finances et du Budget, constatent les auteurs de l’audit mené par la Cour des comptes.

À cela s’ajoutent un « montant de la dette garantie supérieur à celui présenté dans le rapport » gouvernemental, des « déficits budgétaires supérieurs aux niveaux affichés dans le rapport du gouvernement », poursuivent-ils.

« L’encours de la dette bancaire au 31 mars 2024 et les charges futures (intérêts et autres frais à payer) s’élèvent respectivement à 2.517,14 milliards de francs CFA et 302,61 milliards », indique l’audit de la Cour des comptes.

Ses auteurs estiment que « le remboursement de l’encours de la dette d’un montant de 2.517,14 milliards par des crédits budgétaires réduit les marges de manœuvre budgétaire de l’État ».

Ils pensent que « les charges financières de la dette bancaire à payer, d’un montant de 302,61 milliards, auront une grande incidence sur les budgets à venir compte tenu de leur volume et de la durée des échéances ».

« Au total, le montant de la dette garantie par l’État du Sénégal, à travers le MEPC (ministère de l’Économie, du Plan et de la Coopération) et le MFB (ministère des Finances et du Budget), s’élève à 2.265,45 milliards de francs CFA », indique le rapport.

Les fonctionnaires auteurs de l’audit signalent « une importante dette bancaire contractée hors circuit budgétaire ».

« Les engagements de l’État auprès du secteur bancaire découlent de conventions de financement signées par les différents ministres chargés des Finances qui se sont succédé. Ces engagements sont contractés en dehors de l’autorisation parlementaire et ne sont retracés ni dans les lois de finances de la période (LFI, LFR, LR) ni dans les écritures de la direction de la dette publique, service ordonnateur de la dette publique », observent-ils.

La Cour des comptes estime que son audit a permis de faire les constats suivants : « une dette bancaire importante non retracée dans la comptabilité publique ; un service de la dette bancaire élevé ; une gestion de la dette à travers des comptes bancaires mouvementés sur ordre du ministre chargé des Finances ; une dette bancaire exposant l’État à des risques budgétaires ».

Ce document de la Cour des comptes était très attendu par les autorités sénégalaises et les partenaires économiques et financiers de l’État, dont le Fonds monétaire international.

Le 26 septembre dernier, des membres du gouvernement, dont le Premier ministre, Ousmane Sonko, avaient dénoncé la publication de « données erronées » par leurs prédécesseurs, Macky Sall et d’anciens ministres, concernant les comptes publics du pays.

« Les autorités que nous avons remplacées ont menti au pays et aux partenaires en […] fournissant des données erronées », avait avait soutenu M. Sonko en parlant de données publiées entre 2019 et 2023.

Macky Sall a rejeté l’accusation de l’actuel gouvernement selon laquelle lui et certains de ses collaborateurs auraient fait publier des données erronées, concernant les comptes publics du Sénégal.

« Je tiens à dire que ces propos sont faux, totalement faux. Attendons que la justice confirme ou infirme avant d’accuser les gens », a soutenu M. Sall dans une interview donnée à l’agence de presse américaine Bloomberg en octobre dernier.

« Les ministres mis en cause n’ont même pas accès à ces informations […] J’espère que nous arrêterons cette descente aux enfers et nous concentrerons sur l’essentiel. J’ai laissé un pays où les indicateurs étaient au vert. Le Fonds monétaire international a confirmé cela, un mois après que j’ai quitté le pays », s’est-il défendu.

HK/ESF/BK

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