Dakar, 23 jan (APS) – Six anciens ministres de la Fonction publique invités à participer au lancement des ‘’concertations nationales pour la réforme du secteur public’’ ont relevé, jeudi, à Dakar, de nombreuses faiblesses de l’Administration publique, dont le mauvais système d’évaluation des agents publics, la non-utilisation des recommandations faites au cours des précédentes concertations et l’absence de sanctions en cas de non-respect des obligations professionnelles.

L’ancien ministre Mansour Sy estime que l’évaluation des agents publics se fait en sorte qu’‘’on peut croiser les bras, une fois qu’on est recruté, en étant sûr qu’un jour on sera de classe exceptionnelle’’.

Il rappelle, par ailleurs, avoir fait faire un audit physique et biométrique des effectifs de la fonction publique, un exercice qui avait été suivi d’une rationalisation des effectifs.

‘’Il faut éviter ce que j’appelle les réformettes. Nous en sommes à la quatrième ou cinquième génération des réformes. Et nous sommes encore insatisfaits de la qualité de notre secteur public’’, a fait observer Viviane Laure Élisabeth Bampassy.

Mme Bampassy rappelle avoir organisé, lorsqu’elle était ministre de la Fonction publique, un forum dont l’objectif était d’améliorer la qualité du secteur public. ‘’Certaines recommandations de ce forum sont encore dans les tiroirs’’, a-t-elle dit.

‘’L’enjeu majeur [de la réforme du secteur public] consiste à décloisonner cette réflexion. Ces concertations doivent être menées par tout le gouvernement. On n’a pas l’engagement de tout le gouvernement aux côtés du ministère de la Fonction publique […] On a des réformes à vitesses multiples’’, a signalé l’ancienne ministre.

Elle dit avoir remarqué que les fonctionnaires ne sont pas les seuls agents publics pointés du doigt, en ce qui concerne les faiblesses de l’Administration publique. ‘’Il y a aussi les agents de la fonction publique locale. Il faut redéfinir la notion d’agent public en tenant compte de sa diversité.’’

‘’Des agents recrutés seulement sur la base de dossiers arrivent dans la fonction publique sans connaître cette notion (agent public). Vous leur parlez de déontologie et d’éthique, ils ne savent pas de quoi vous parlez.’’

Viviane Laure Élisabeth Bampassy invite le ministère de la Fonction publique à modifier la loi de la fonction publique, qu’elle trouve ‘’illisible’’.

‘’Ça ne doit pas être une simple rencontre de plus. Le mal est très profond. Le diagnostic a été fait depuis longtemps. Le partage du diagnostic avec les usagers, c’est ce que vous devez faire maintenant’’, a dit Zakaria Diaw, rappelant que plusieurs concertations ont déjà eu lieu.

‘’Il faut que chacun se demande s’il mérite son salaire’’, a soutenu cet administrateur civil et ancien ministre de la Fonction publique.

M. Diaw rappelle avoir demandé à chacun de ses collaborateurs de s’autoévaluer, lorsqu’il a été nommé ministre, secrétaire général de la présidence de la République. ‘’Personne n’a voulu le faire.’’ Si un agent public a peur d’évaluer ses propres performances, c’est parce qu’il n’a pas correctement fait son travail, a soutenu Zakaria Diaw.

‘’Je rêve de voir un ministre de la Fonction publique assez puissant pour mettre en œuvre les réformes souhaitées (…) Je demande qu’une attention particulière soit accordée à ce ministère’’, a affirmé Gallo Ba.

Innocence Ntap Ndiaye, qui fait partie de ses prédécesseurs, estime que ‘’le ministère de la Fonction publique est le cœur de l’État’’.

Elle préconise, par ailleurs, le renforcement de la formation continue, d’autant plus qu’‘’il ne suffit pas de sortir des grandes écoles’’.

‘’Notre administration ne connaît pas les sanctions’’, a-t-elle ajouté, considérant le taux d’analphabétisme important des usagers comme un obstacle à l’efficacité du secteur public.

Habib Sy suggère de revoir la formation dispensée dans les écoles de formation. ‘’Allez à l’ENA (l’École nationale d’administration) ! On y dispense une formation d’administration de répression. C’est valable pour les commissaires aux enquêtes économiques dont je fais partie (…) On n’a pas formé des managers’’, a relevé l’ancien ministre et actuel président du conseil d’administration de la Société nationale d’électricité du Sénégal.

‘’Il y a quelque chose de fondamental qui fait défaut : l’audit de la gouvernance. Dans notre administration aussi, le système de rémunération n’est pas équitable’’, a signalé Habib Sy, ajoutant qu’‘’il faut donner davantage de compétences et de considération au ministère de la Fonction publique’’.

L’actuel ministre de la Fonction publique et de la Réforme du secteur public, Olivier Boucal, a procédé au lancement, ce jeudi, des ‘’concertations nationales pour la réforme du secteur public’’.

‘’C’est une initiative majeure dans la dynamique de transformation systémique’’ du pays, a dit M. Boucal lors du lancement de ces échanges auxquels il a invité ses prédécesseurs.

Les autorités ont diagnostiqué ‘’beaucoup de maux’’ dont souffre le secteur public, ce qui les a amenés à organiser ces rencontres destinées à en identifier les causes et à leur trouver des remèdes, a-t-il affirmé en présence d’Aminata Touré, Haut Représentant du président de la République, de représentants d’associations de consommateurs et d’organisations syndicales.

ESF/MTN

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