Par Cheikh Tidiane SarrKaffrine, 2 oct (APS) – Lahine Ndao, un jeune entrepreneur agricole, originaire de la commune de Kahi, dans la région de Kaffrine (centre-ouest), a décidé de faire de la protection de l’environnement un sacerdoce, tout en s’occupant de sa ferme, ‘’Naatangué Farm’’.Située à Djidah 2, un village de la commune de Kahi, la ferme d’une superficie de 900 mètres carrés, au départ, s’étend aujourd’hui sur 1 ha 300 m2.C’est en 2020 qu’il se lance dans cette activité avec l’objectif de produire, transformer et commercialiser des produits sains, en promouvant les bonnes pratiques agricoles.Le projet a été rendu possible grâce à une formation financée par le programme ‘’Food for Life’’ (De la nourriture pour la vie, en anglais) de l’organisation internationale Mercy Ships en partenariat avec ‘’Beersheba’’, le premier centre agroécologique certifié Bio.Devenu formateur sur les questions environnementales, il décide de retourner au bercail pour partager ses connaissances sur les bonnes pratiques agricoles avec les jeunes et les femmes de sa localité.‘’C’est un modèle qui inspire beaucoup de jeunes de la commune de Kahi, de la région de Kaffrine et de toute l’Afrique’’, s’honore le jeune agriculteur.Dans sa ferme agroécologique, il a choisi de pratiquer une agriculture respectueuse des normes environnementales, tout en s’évertuant à apporter sa contribution à l’autosuffisance alimentaire au Sénégal.En arrivant dans la ferme, le visiteur est accueilli par le gazouillement d’oiseaux d’espèces différentes.Ilot de verdureL’exploitation est entournée d’une clôture de haies vives. On y accède par une petite porte.‘’Nous voilà à la ferme +Naatangué Farm+’’, lance-t-il au reporter de l’Agence de presse sénégalaise (APS) en guise bienvenue.Le regard du visiteur tombe d’abord sur un espace verdoyant. Des florales, des légumes, des légumineuses et des arbres fruitiers tapissent le sol.Les plants sont visiblement bien organisés avec un robinet pour faciliter l’arrosage, du sable de rivière et d’autres accessoires.L’entretien avec le journaliste est par moments perturbé les gambadements de canetons. Sur un fourneau rempli de charbon repose une théière, signe que le propriétaire des lieux est certainement un amateur de thé.‘’C’est mon quotidien. Chaque matin, je prépare du thé avant d’entamer les travaux’’, s’empresse de lancer le fermier. Agé d’une trentaine d’années, l’homme parait de prime abord timide. Une fausse impression, pourtant.De la nécessité d’une alimentation saineDans la ferme Naatangué sont pratiquées à la fois l’aviculture, la cuniculture, l’arboriculture, la culture fourragère et le maraîchage.‘’On ne peut pas réussir une production, vouloir sauver le monde sans des aliments sains. Il faut impérativement une production saine qui tienne compte de la santé du sol, du producteur, du consommateur et même de l’environnement’’, soutient le propriétaire.Ancien étudiant à l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar, Lahine a travaillé pour de grandes organisations internationales telles que Mercy Ships et GreenGelo. C’est par la suite qu’il s’est lancé, à son propre compte, dans l’agriculture et la protection de l’environnement, dans sa région natale de Kaffrine.‘’Kaffrine est une région qui, comme beaucoup d’autres collectivités territoriales du pays, n’a pas encore atteint l’autosuffisance alimentaire. Ici, le changement climatique gagne du terrain, et les populations sont très peu sensibilisées aux questions environnementales’’, déplore-t-il.Dans son périmètre agroécologique, toute la chaîne de valeur agricole est prise en compte. L’objectif est d’en faire une source d’inspiration pour les populations, particulièrement les jeunes, par rapport notamment au respect de l’environnement.Si le jeune entrepreneur agricole plante des arbres sur ses terres agricoles, c’est avant tout pour pouvoir capter le dioxyde de carbone, également appelé gaz carbonique ou anhydride carbonique ou CO2.‘’Nous avons opté pour une production d’aliments sains, parce que nous avons constaté qu’il y a beaucoup de maladies en Afrique, plus particulièrement au Sénégal, dues à l’alimentation’’, souligne Lahine Ndao.Pour le moment, il se focalise sur la production des fruits et légumes biologiques et offre en même temps des stages aux jeunes et aux étudiants ainsi qu’à toute personne désireuse d’acquérir des connaissances en agroécologie.Il dit avoir été contacté par beaucoup de personnes souhaitant implanter ce type de projet dans leurs collectivités territoriales ou dans leurs pays. Récemment, il a formé plus de 200 femmes grâce à l’appui de l’organisation World Vision sur les bonnes pratiques agricoles.‘’C’est un état d’esprit qui nous anime à Naatangué Farm. Nous voulons certes faire de la production mais tout en respectant l’environnement, car l’écosystème est un ensemble et il faut respecter les réalités climatiques’’, déclare Lahine Ndao.Dans sa ferme agroécologique, l’association culturale est bien respectée, assure-t-il.L’agroécologie, rappelle-t-il, a quatre principes : le labeur minimum ou le travail minimum du sol, l’association culturale, la rotation et la couverture permanente du sol.Sa ferme renferme beaucoup de plantes comme le morénga, le citronnier, le bananier, le pois d’Angole, le papayer, le fruit de la passion, le jujubier, la pomme cannelle. On y cultive aussi des légumes comme les aubergines, le poivron, la courge, le niébé, le gombo et des plantes aromatiques telles que la menthe, le basilic, la citronnelle, la mélisse et des fleurs, comme le tournesol, le zinnia et le cosmos.Une kyrielle de difficultésNonobstant ses nombreux efforts, le jeune entrepreneur reste confronté à moult difficultés, surtout dans le domaine de la maîtrise de l’eau.‘’L’accès à l’eau constitue un réel problème à +Natangué Farm+. On utilise l’eau du robinet que nous payons très cher. Mais, il fallait démarrer parce que nous ne pouvions pas attendre d’avoir notre propre forage’’, dit-il.Le jeune entrepreneur agricole paye la facture d’eau chaque deux mois. ‘’C’est difficile, mais nous gérons la situation en attendant d’avoir mieux’’, déclare-t-il, soulignant que le maraîchage va ‘’forcement’’ de pair avec la disponibilité de l’eau.Selon lui, ‘’vouloir faire du maraîchage avec l’eau des robinets, c’est très difficile et pas adéquat avec parfois la cherté des factures et les coupures intempestives et la faible quantité de l’eau’’.Il lance un appel solennel aux structures étatiques, aux bailleurs de fonds, aux investisseurs et autres bonnes volontés, afin de pouvoir disposer de son propre forage. ”(…) nous avons un autre hectare de terre que avons commencé à aménager, mais faute de moyens et à cause de la cherté d’eau, nous ne parvenons pas à l’exploiter comme nous le souhaitons’’, déplore Lahine Ndao.Et la mission est d’autant plus difficile pour lui qu’il n’ a qu’une équipe de deux personnes. Sa mère est chargée de superviser les activités, aidée en cela par une jeune fille d’une vingtaine d’années venue de Dakar.‘’Il faut que les autorités nous accompagnent et nous appuient à contribuer davantage au développement économique du pays, à l’autosuffisance alimentaire, à la protection de l’environnement, au partage de connaissances et à la création d’emplois’’, plaide-t-il.L’ambition de réussir chez soiLahine Ndao est le deuxième lauréat du concours ‘’Climate Launchpad 2022’’, un projet incubé par Makesense. Il lui a permis de trouver son business model et de réaliser des profits tout en impactant positivement l’environnement.Il a été également sélectionné pour représenter le Sénégal à CPLA 2022 (Camp de programme de leadership africain) où son projet de ferme agroécologique ‘’Natangué Farm’’ a été nominée parmi les dix projets innovants de l’économie verte et de l’économie numérique.‘’Il y a l’engagement, la détermination, la passion et nous comptons aller jusqu’au bout, parce que nous estimons que personne ne viendra construire notre pays’’, affirme-t-il.Ce projet de ferme agroécologique, révèle-t-il, a également été sélectionné récemment par l’université Sine-Saloum El Hadji Ibrahima Niass (USSEIN), parmi les dix meilleurs projets de l’incubateur ‘’Dékkal Yaakaar’’. Il a été présenté à l’ancien président de la République, Macky Sall, lors de sa dernière visite économique à Kaolack (centre).‘’Travaillez dur, croyez-en vous-même et en vos rêves et, surtout, ne cessez jamais d’essayer’’, conseille-t-il aux jeunes.Ndao est par ailleurs très engagé dans le social. Ce qui lui a valu de remporter de nombreuses distinctions et d’être nommé ‘’ambassadeur de la jeunesse et de la paix’’. Il est actuellement ‘’Ambassadeur pour la lutte contre les drogues’’.Le jeune entrepreneur agricole a récemment reçu un certificat de formateur en agroécologie avec l’ONG Mercy Ships, en collaboration avec Beersheba.‘’Nous ne souhaitons pas sortir du pays pour tenter l’émigration, parce que nous sommes conscients que nous faisons partie de ces jeunes qui peuvent rester et travailler dans leur pays. Nous allons investir, travailler et réussir au pays’’, lance-t-il.CTS/ADE/ASB/OID
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