SÉNÉGAL-CULTURE-MEMOIRE
Dakar, 7 mai (APS) – L’Institut français de Dakar a abrité mardi soir une soirée culturelle intitulée ”Mémoire et Avenir”, en prélude à la Journée de commémoration de l’esclavage, de la traite négrière et de leurs abolitions, célébrée le 10 mai.
L’évènement a été marqué par deux temps forts, une performance du chorégraphe camerounais Zora Snake et une lecture de texte par l’auteure franco-sénégalaise Penda Diouf.
La première partie de la soirée qui s’est déroulée dans la grande cour de l’Institut a été animée par Zora Snake avec sa pièce ”L’Opéra du villageois”, une performance chorégraphique dans laquelle le danseur aborde les questions de restitution des objets d’art africains emportés durant la colonisation.
En mêlant danse physique, musique traditionnelle, extraits de discours politiques et chants lébous, l’artiste a installé une atmosphère rituelle et engagée.
”Les objets rituels ne sont pas de simples œuvres d’art, ils portent une mémoire, une charge spirituelle, et leur absence continue d’affecter nos communautés”, a-t-il déclaré à l’issue de sa prestation. Il a souligné l’importance de revaloriser les héritages culturels africains, à travers l’art et la réflexion politique.
Le deuxième acte de la soirée qui s’est déroulé dans la salle cinéma a été marqué par la lecture du texte ”Ariette Tubman, Passeuse de l’ombre” de Penda Diouf, une pièce retraçant la vie de Harriet Tubman, ancienne esclave devenue militante de la liberté aux États-Unis. Créée en janvier dernier à Bruxelles, la pièce a été présentée pour la première fois au Sénégal.
”Harriet Tubman a été la première femme noire à commander une armée aux États-Unis. Elle a sauvé plus de 300 esclaves en les guidant vers la liberté. C’est une figure majeure, souvent oubliée, à laquelle j’ai voulu rendre hommage”, a confié l’auteure.
Originaire du Sénégal, Penda Diouf a dit sa joie de présenter son travail devant sa famille et le public dakarois. ”C’est un grand moment pour moi. Porter ce texte ici, dans mon pays d’origine, donne une dimension particulière à ce projet. Il s’agit de mémoire, mais aussi de transmission et de fierté”, a-t-elle ajouté.
Dans la même veine, Penda Diouf anime à l’alliance française de Ziguinchor, la lecture de sa pièce intitulée ”Piste”. Ce texte aborde le génocide des Hereros et des Namas en Namibie sous l’occupation allemande.
”Je m’intéresse à l’histoire des silences, aux héros oubliés. Mon écriture est un travail de mémoire, de justice et de réparation symbolique”, a-t-elle expliqué.
L’écrivaine a également annoncé des projets en cours, dont un roman et une pièce de théâtre sur Julius Eastman, compositeur afro-américain méconnu du grand public.
Elle travaille aussi sur des thématiques environnementales, avec une pièce consacrée à la pollution des sols, et une autre, La Grande Ourse, actuellement en tournée, mettant en scène la transformation métaphorique d’une femme en ours.
Dans son allocution, la directrice de l’Institut français de Dakar, Valérie Lesbros, a rappelé que cette soirée s’inscrivait dans une programmation mensuelle consacrée aux thématiques de la mémoire et de l’avenir.
”Nous voulons offrir des espaces d’expression aux artistes du continent et de la diaspora, pour interroger l’histoire et penser ensemble, notre futur”, a-t-elle souligné.
Elle a également évoqué d’autres projets en cours dans ce cadre, notamment une création du musicien Alioune Wade sur l’histoire du jazz et ses racines africaines, qui sera accompagnée d’un concert, d’un film documentaire et d’une table ronde.
Le mois de mai verra aussi la tenue d’activités en Casamance, à Saint-Louis et à l’IFAN, incluant expositions, lectures, et marchés de créateurs, selon Valérie Lebros.
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