Thionokh, nom si assorti d’un village enclavé dans le Ranérou
Thionokh, nom si assorti d’un village enclavé dans le Ranérou

SENEGAL-SOCIETE-REPORTAGE

Par Amadou Thiam

Thionokh (Ranérou), 20 mai (APS) – Thionokh, c’est un village de la région de Matam situé à la confluence de trois autres, à savoir Louga, Kaffrine et Tambacounda. C’est le dernier village du département de Ranérou à l’orée de ces trois régions.

Mais Thionokh, c’est aussi et surtout un village confronté depuis longtemps à des problèmes d’eau, d’où son nom d’origine “Thiono Ndox”.

Il n’y a toutefois pas que cela comme problème dans ce village qui fait face à bien d’autres difficultés se traduisant par le manque de sécurité et le vol de bétail, liées d’une certaine manière au manque d’électricité et à l’enclavement, le grand mal de certaines des zones les plus reculées de nombreuses régions du Sénégal.

Pour se rendre à Thionokh, il faut se préparer à un long voyage, parcourir 245 kilomètres à partir de Matam, passer par Ranérou, faire encore 105 bornes pour atteindre Vélingara Ferlo, avant de terminer le trajet avec 45 autres kilomètres.

A partir du croisement de Vélingara Ferlo, la route est encore en construction, avec des engins et ponts visibles sur la route. De là à Thionokh, il faut rouler sur une route sablonneuse, longue de 45 km.

Ce dimanche, le village était animé, beaucoup de personnes étant venues de plusieurs localités pour participer à une cérémonie, au cours de laquelle 27 communautés de femmes ont fait une déclaration publique d’abandon de la pratique de l’excision, à l’initiative de l’ONG Tostan.

Le village est habité aujourd’hui par 2773 personnes, des Peuls, mais aussi des Wolofs et Sérères cohabitant dans une bonne entente.

Les habitants de ce village vieux de plus 150 ans vivent en parfaite harmonie, d’après Mbaye Kâ. Une cohabitation de différentes ethnies rare dans cette zone du Ferlo peuplée en majorité de Peuls.

Même en un jour si peu ordinaire, la présence d’un groupe de femmes autour d’un puits a de quoi intriguer. Il s’avère que cet attroupement s’explique par une pénurie d’eau causée par la panne du moteur du principal forage du village.  

“Le moteur du forage actuellement en panne doit être réparé pour un montant de plus d’un million de francs CFA. Nous sommes à la recherche de fonds pour le remettre en marche. Nous passons des journées entières dans un bureau pour recueillir l’argent devant servir à refaire fonctionner le forage”, explique le chef du village Mbaye Kâ.

Selon lui, un projet a proposé aux villageois l’installation de panneaux solaires et tout le matériel qui va avec, moyennant la somme de 12 millions de francs CFA.

Cette infrastructure, dit-il, polarise 12 villages, sans compter les nomades actuellement présents à Thionokh, “ce qui fait que le moteur est usé à cause du nombre important d’usagers”.

Concernant l’histoire du village, il rappelle que le nom de la bourgade vient du wolof “Thiono ndox”, ce qui suffit à convaincre que le manque d’eau date de très longtemps dans cette localité.

Des malades évacués à Kaffrine, Koungheul et Touba

“Le village a toujours connu des problèmes d’eau depuis très longtemps. C’est pour cela que les premiers habitants ont appelé le village ‘Thiono ndox, devenu Thionokh au fils du temps. Il a été habité en premier par des gens venus du Diolof”, explique-t-il.

Dans un département marqué par la pratique de l’élevage, Thionokh propose autre chose que des activités pastorales, l’agriculture et le commerce par exemple, avec la production de mil et d’arachide. Des produits vendus à Touba, localité avec laquelle Thionokh échange le plus au plan économique.

En plus des problèmes d’eau, les agriculteurs de ce village sont aussi confrontés à la cherté des semences, si l’on en croit Mbaye Kâ. Il note toutefois que les récoltes font vivre les agriculteurs qui tirent un grand bénéfice de cette activité.

Le village bénéficie pourtant de l’énergie solaire grâce à un projet de l’Etat du Sénégal réalisé en 2024.

En plus des difficultés d’accès à l’eau, Thionokh souffre aussi du vol de bétail, un phénomène qui “ruine” les éleveurs, sans compter le chômage des jeunes et les problèmes de sécurité, la brigade de gendarmerie la plus proche se trouvant à 45 km, à Vélingara.

“Nous réclamons une brigade de gendarmerie. Mbem Mbem, un autre village du département de Ranérou, doit aussi en disposer. Entre Vélingara et Thionokh, il n’y a pas de sécurité. Il n’y a rien sur cet axe”, souligne M. Kâ.

Il explique que le dernier village de Louga auquel Thionokh est frontalier se trouve à 4 km, alors que 15 et 8 bornes respectivement le séparent de la dernière localité des régions de Tambacounda et Kaffrine.

Cet éloignement avec Matam ne manque pas de causer des problèmes sanitaires. ”Nos évacuations se font vers Koungheul, Touba et Kaffrine. On est très loin des structures sanitaires de la région de Matam. Nous sommes presque à l’extrémité sud de la région”, soutient Aliou Kâ, conseiller départemental de Ranérou et habitant de Thionokh.

Il semble beaucoup miser sur le Projet d’amélioration de la connectivité des zones agricoles (PCZA) reliant les régions de Matam, Kaffrine et Kaolack, lequel devrait contribuer, dit-il, au désenclavement de Thionokh tout en permettant aux producteurs d’échanger leurs produits avec leurs homologues de ces deux autres régions.

Ce projet est aussi attendu pour faciliter la mobilité, a-t-il indiqué, ajoutant que cette initiative est financée par la Banque africaine de développement (BAD) et mis en œuvre sous la supervision de l’Ageroute, l’agence en charge des travaux et de la gestion des routes.

AT/BK/ASG

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