SENEGAL-ECONOMIE-GENRE
Dakar, 3 juin (APS) – Les femmes consacrent 15 fois plus de temps à la production que les hommes dont la contribution aux travaux de soins reste ”insignifiante”, a déclaré, lundi, à Dakar, la directrice de l’équité et de l’égalité de genre au ministère de la Famille et des Solidarités, Astou Diouf Guèye, citant une étude réalisée par ses services.
Le temps consacré à la production par les femmes “connaît une hausse régulière jusqu’à atteindre un pic de 14,65 heures par semaine entre 30-40 ans, représentant un écart de près de 15 fois plus de temps consacré par les femmes aux travaux de soins”, a-t-elle indiqué.
Elle intervenait lors de la cérémonie d’ouverture d’un atelier de restitution des résultats de cette étude portant sur la valorisation du travail domestique des femmes et l’autonomie des soins.
Cette étude, menée entre 2018 et 2022, vise à permettre aux acteurs concernés par cette question – ministères sectoriels, parlementaires et organisations de la société – de disposer de statistiques de base pour analyser les enjeux liés “au travail domestique non rémunéré”.
Selon la directrice de l’équité et de l’égalité de genre au ministère de la Famille et des Solidarités, ce rapport d’analyse “montre que le temps de production des femmes connaît une hausse régulière jusqu’à atteindre un pic de 14,65 heures par semaine entre les âges (30-40 ans)”.
Mme Guèye fait observer que la contribution masculine reste “insignifiante”, avec une valeur moyenne de “0,575 heure par semaine, alors que la moyenne féminine s’élève à 8,671 heures par semaine”.
“Cela représente un écart de près de 15 fois plus de temps consacré par les femmes aux travaux de soins”, a noté la directrice de l’équité et de l’égalité de genre, soulignant que cette asymétrie “reste marquée dans toutes les tranches d’âge”.
D’après Astou Diouf Guèye, “si ce travail des femmes était valorisé au salaire minimum horaire, il représenterait 13,9% du PIB national”.
Elle en conclut que l’intégration de la valeur économique du travail domestique dans les politiques publiques est une exigence.
Aussi appelle -t-elle à “une réforme des outils de planification pour mieux prendre en compte le travail non rémunéré dans les politiques sectorielles”, tout en renforçant les services publics de soins, tels que les crèches et autres “structures de prise en charge pesant sur les épaules des femmes”.
Mme Guèye a aussi prôné “la promotion du partage équitable des responsabilités domestiques entre les hommes et les femmes, à travers l’éducation et la communication”.
Selon Astou Diouf Guèye, il a été ainsi recommandé un engagement fort des cellules genre et équité et des organisations de la société civile dans le suivi, le plaidoyer et la co-construction de réponses durables et équitables aux problèmes enregistrés dans ce domaine.
“Il s’agit de reconnaître ce travail non comptabilisé dans le système national et de penser à le réduire pour permettre aux femmes de pouvoir mener des activités économiques et les redistribuer”, a-t-elle dit.
La représentante de l’ONU-Femmes au Sénégal, Ndèye Seynabou Sarr, s’est réjouie de “cette initiative stratégique qui met en lumière une réalité qui est souvent ignorée”, à savoir “la contribution invisible, mais essentielle des femmes à l’économie nationale à travers le travail domestique non rémunéré et les soins”.
“Le poids de cette charge supportée majoritairement par les femmes et les filles freine leurs activités d’accès à l’éducation, à l’emploi décent, à la participation politique et à la pleine jouissance de leurs droits”, a-t-elle relevé.
Le coordonnateur du Consortium régional pour la recherche en économie générationnelle (CREG), Dramani Latif, s’est aussi félicité de la tenue de cet atelier, qui, dit-il, “constitue un cadre pertinent pour passer en revue les évidences générées et informer les sectoriels tels que les parlementaires et la société civile”.
“Cet atelier se veut un cadre pour poser le débat sur une question qui est au cœur des mutations de nos sociétés, notamment la protection sociale et les solidarités invisibles […]”, a poursuivi le professeur Dramani Latif.
CS/BK/SMD