La solidarité et la souveraineté énergétique proposées comme remèdes aux conséquences de la crise entre Israël et l’Iran
La solidarité et la souveraineté énergétique proposées comme remèdes aux conséquences de la crise entre Israël et l’Iran

SENEGAL-MOYENORIENT-ECONOMIE

Dakar, 24 juin (APS) – Une fermeture du détroit d’Ormuz en raison de la crise au Moyen-Orient risque d’entraîner une flambée des prix du pétrole et du gaz dans le monde, une situation à laquelle certaines régions, dont l’Afrique, devraient se préparer en recourant à ‘’des logiques de solidarité, de réciprocité et de souveraineté énergétique’’, analyse Oumar Ba, un doctorant en droit public et manager des ressources gazières et pétrolières.

En guise de protestation contre les tirs menés par Israël sur l’Iran, les parlementaires iraniens ont adopté, dimanche, une mesure autorisant les dirigeants de leur pays à fermer le détroit d’Ormuz. Il s’agit d’un corridor d’une trentaine de kilomètres contrôlé par l’Iran et le sultanat d’Oman, par lequel passe une importante partie de la production mondiale de pétrole.

Mais l’annonce d’un cessez-le-feu entre les deux belligérants fait éloigner temporairement cette perspective.

La fermeture de ce détroit ‘’mettrait à rude épreuve les équilibres budgétaires […] Il est déplorable de constater que la majorité des pays africains reste structurellement dépendante des importations d’hydrocarbures. La fermeture du détroit d’Ormuz entraînerait de facto une flambée des prix du pétrole et du gaz sur les marchés internationaux’’, a dit Oumar Ba dans une interview publiée mardi par le quotidien sénégalais Le Soleil.

‘’Éviter ce que l’on appelle la ‘maladie hollandaise’’’

”Pour des économies fragiles comme celles de notre continent, cela signifierait une pression budgétaire accrue et une hausse généralisée des prix, qui impacteraient à la fois le panier de la ménagère (les prix des denrées alimentaires), les transports, l’électricité et les biens de consommation de première nécessité. Le risque d’inflation galopante et de tensions sociales est donc réel, surtout dans un contexte de morosité économique aggravée par les séquelles de la pandémie de Covid-19’’, a répondu M. Ba à la question de savoir quelles seraient les conséquences de la fermeture du détroit d’Ormuz sur l’Afrique.

Selon lui, le détroit d’Ormuz est le lieu de transit de plus de 20 millions de barils de pétrole brut par jour et de 30 % du gaz naturel liquéfié produit dans le monde.

Pour éviter d’être privés des hydrocarbures transitant par ce corridor, ‘’il est […] urgent’’, pour les pays africains par exemple, d’‘’envisager une réponse structurelle Sud-Sud, fondée sur des logiques de solidarité, de réciprocité et de souveraineté énergétique, afin de réduire notre dépendance vis-à-vis des pays industrialisés’’, suggère Oumar Ba.

”L’Afrique, si elle veut éviter de subir les externalités négatives de cette crise, doit renforcer l’intégration économique et politique entre ses États. Cette menace récurrente sur le détroit d’Ormuz a le mérite de rappeler aux pays africains l’urgence de repenser leurs stratégies énergétiques’’, a poursuivi M. Ba.

”Cela suppose notamment de diversifier les sources d’approvisionnement, d’accélérer l’investissement dans les énergies propres et de promouvoir une coopération énergétique régionale intégrée. Cette crise impose aussi aux États africains de concevoir des solutions durables par la mise en place de mécanismes fiscaux résilients aux chocs extérieurs, une taxation différenciée des produits pétroliers importés, l’élaboration d’une fiscalité environnementale attractive et des incitations à la transition énergétique’’, recommande le doctorant aux dirigeants des pays susceptibles d’être des victimes collatérales de la crise au Moyen-Orient.

Il explique que ‘’l’objectif’’ de telles mesures serait d’‘’éviter ce que l’on appelle la ‘maladie hollandaise’, qui se traduit, entre autres, par une dépendance envers les revenus volatils des ressources naturelles et une vulnérabilité aux chocs externes’’.

Le Sénégal, qui a commencé à produire du pétrole et du gaz en 2024, pourrait davantage tirer profit de ces hydrocarbures en raison de la situation conflictuelle au Moyen-Orient, selon Oumar Ba.

‘’Les hydrocarbures sénégalais pourraient devenir plus attractifs sur les marchés internationaux’’

”Avec le démarrage des projets Sangomar (pétrole) et GTA (gaz), le Sénégal est en train de passer du statut d’importateur à celui de producteur et, potentiellement, d’exportateur d’hydrocarbures. Une crise à Ormuz fragiliserait certes nos équilibres budgétaires, particulièrement à travers les subventions des produits pétroliers et le coût de production de l’électricité. Mais, paradoxalement, cette crise peut aussi représenter une opportunité géostratégique pour le Sénégal’’, a analysé M. Ba.

Il pense que ‘’les hydrocarbures sénégalais en cours d’exploitation pourraient devenir plus attractifs sur les marchés internationaux’’, vu le ‘’contexte de perturbation des grandes routes énergétiques mondiales exacerbé par la guerre en Ukraine et les tensions en mer Rouge’’.

”Le gaz sénégalais pourrait être exporté sous forme de GNL (gaz naturel liquéfié) vers l’Europe ou acheminé vers les pays voisins pour renforcer l’intégration énergétique régionale. Pour concrétiser cette opportunité, le Sénégal doit remplir deux conditions : maintenir une stabilité politique et garantir la sécurité juridique. C’est en rompant avec une dépendance structurelle que le Sénégal peut se positionner comme un acteur énergétique alternatif crédible, d’abord pour l’Afrique, mais aussi pour une Europe en quête de diversification énergétique’’, a dit Oumar Ba.

Le détroit d’Ormuz est entouré de cinq pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, l’Arabie saoudite, l’Iran, l’Irak, le Koweït et les Émirats arabes unis.

ESF/OID

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