ALGERIE-AFRIQUE-CINEMA
De l’envoyé spécial de l’APS, Moussa Konté
Timimoun (Algérie), 17 nov (APS) – La réalisatrice, productrice et scénariste algérienne Hadjer Sebata, auteure du film ‘’L’Avion jaune’’ (‘’Tayara Safra’’, en arabe) et invitée du Festival international du court-métrage de Timimoun (Algérie), a plaidé, dans un entretien avec l’Agence de presse sénégalaise (APS), pour le renforcement du partenariat cinématographique entre l’Algérie et le Sénégal.
‘’Nous devons aller vers le renforcement des échanges cinématographiques entre l’Algérie et le Sénégal, avec des accords de partenariat’’, a-t-elle suggéré.
Sebata salue le plaidoyer fait par l’ambassadeur du Sénégal en Algérie, Mbaba Coura Ndiaye, en faveur d’une convention de partenariat cinématographique entre les deux pays.
Le Sénégal est le pays invité d’honneur du Festival international du court-métrage de Timimoun, une ville située dans le sud-ouest de l’Algérie.
‘’Nous avons besoin de collaborations, de coproductions, d’échanges de compétences et de formations. Si nous ne racontons pas nous-mêmes nos récits africains, d’autres le feront à notre place et moins bien que nous’’, a prévenu Hadjer Sebata, soutenant ensuite : ‘’La coopération entre l’Algérie et le Sénégal est une nécessité.’’
La réalisatrice souhaite que la collaboration cinématographique entre l’Algérie et le Sénégal s’étende à d’autres pays d’Afrique, pour la production d’‘’un cinéma africain inspiré, solidaire et ancré dans ses mémoires’’.
Sebata s’est réjouie de l’invitation faite au Sénégal à la première édition du Festival international du court-métrage de Timimoun. ‘’Le Sénégal a présenté de très beaux courts-métrages, avec une diversité de thèmes : le drame, l’amour, le fantastique, etc. C’est une véritable fierté d’accueillir les cinéastes sénégalais’’, a-t-elle dit.
Une chanson emblématique de la guerre de libération d’Algérie
Fondatrice de la société de production audiovisuelle et cinématographique Cam’Art Films en 2017, Hadjer Sebata travaille dans ce secteur depuis vingt-cinq ans. Productrice exécutive et co-scénariste de ‘’L’Avion jaune’’, elle s’est ensuite investie pleinement dans la réalisation. Elle était la seule femme des 11 cinéastes sélectionnés à la suite d’un appel à candidatures du ministère algérien de la Culture, pour la commémoration du 60ᵉ anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. Les cinéastes choisis avaient présenté 11 projets de fiction court-métrage.
Son film, ‘’The Yellow Plane’’, ou ‘’L’Avion jaune’’, produit avec le soutien du Centre algérien de développement du cinéma, connaît depuis 2024 un parcours remarquable, avec 10 distinctions : huit prix internationaux décernés au Canada, au Botswana, en Italie et dans d’autres pays, et deux prix nationaux en Algérie. ‘’L’Avion jaune’’ a été projeté dans 11 festivals.
Ce film est né de la volonté de Hadjer Sebata de ‘’faire un véritable pas dans la réalisation’’, sur un sujet profondément ancré dans la mémoire algérienne, selon ses propres termes. ‘’L’Avion jaune’’ évoque une chanson emblématique de la guerre de libération d’Algérie (1954-1962), interprétée en guise de deuil par une femme algérienne après la mort de son frère, qui a été victime d’un bombardement mené par l’aviation française.
‘’Cette chanson nous a bercés pendant des générations. Elle fait partie du patrimoine national et a été reprise par de nombreux artistes. J’ai voulu raconter cette mémoire collective…’’ a raconté Sebata à l’APS.
‘’Il y a très peu de femmes derrière la caméra’’
L’héroïne du film, Djamila, porte un prénom hautement symbolique dans l’histoire de la guerre d’Algérie. ‘’L’Avion jaune’’ est en même temps un clin d’œil de la réalisatrice à sa mère, qui s’appelle Djamila, elle aussi. ‘’Elle a fui les bombardements de l’avion jaune’’, dit la cinéaste.
‘’Ce personnage représente toutes les femmes algériennes qui ont perdu un être cher, qui ont vécu la guerre et la résistance’’, affirme Hadjer Sebata.
Tout en accordant beaucoup d’importance à la contribution des femmes à la cinématographie de son pays, elle déplore leur faible représentation dans le cinéma algérien. ‘’Il y a très peu de femmes derrière la caméra’’, observe la cinéaste, ajoutant qu’elles constituent moins de 20 % des effectifs des métiers techniques du cinéma.
‘’Pourtant, la vision féminine est essentielle : la sensibilité des femmes, leur rapport intime à la culture, à la famille et à l’identité donnent une dimension unique aux récits’’, analyse Sebata.
‘’À chaque projection, je vois des larmes dans la salle. Cela prouve que la sensibilité féminine touche le public et donne de la force à nos histoires’’, raconte-t-elle en parlant de ‘’L’Avion jaune’’.
MK/ESF

