Dakar, 17 juil (APS) – Coumba Diakhaté Mar, journaliste à la RTS, la chaine de télévision publique sénégalaise, a réalisé un film documentaire sur Ousmane Sembène, présenté en avant-première à la clôture de la 3e édition des Journées du documentaire artistique de Dakar ‘’Camera 72’’.

Le film intitulé ‘’Sembène, la plume et la caméra’’ vise à mieux faire connaître l’écrivain et cinéaste sénégalais au public jeune, les élèves et les étudiants notamment, a expliqué mercredi la réalisatrice après la diffusion en avant-première de l’œuvre.

Ousmane Sembène, écrivain et réaliste autodidacte est considéré comme l’un des pionniers du cinéma africain. Disparu en 2007, le cinéaste militant aurait eu 100 ans cette année.

‘’Le grand public gagnerait également à mieux connaitre l’homme et son œuvre, afin de saisir son engagement socio-politique et culturel pour les petites gens’’, a souligné la réalisatrice ‘’fascinée par le côté très résilient de Sembène.’’

‘’J’aimerai vraiment que les gens découvrent cette facette de Sembène qui a quitté l’école très tôt, renvoyé qu’il a été après avoir refusé d’apprendre la langue corse en primaire’’, raconte-t-elle.

‘’Il a été fiché et banni de toutes les écoles sur l’étendue du territoire de l’ex-AOF. Ce qui ne l’a pas empêché de devenir un des pionniers du cinéma en Afrique et un des grands auteurs de la littérature francophone d’Afrique’’, a témoigné un des intervenants dans le film.

Coumba Diakhaté Mar insiste d’ailleurs sur la nécessité pour les jeunes de prendre exemple sur Sembène, ‘’lire ou  relire ses oeuvres littéraires afin de comprendre son combat pour l’émancipation des petites gens, des femmes et plus généralement des peuples opprimés’’.

L’idée du film-documentaire qu’elle a consacré à Sembène est venue d’une discussion avec le directeur de la RTS, Racine Talla, confie celle qui animait déjà la rubrique ”Découvertes”, une émission qui met sous les projecteurs des personnes et des lieux du patrimoine national.

‘’Au début, il s’agissait de réaliser un grand reportage sur Sembène, ses productions filmiques et littéraires, dans le cadre de la célébration de son centenaire’’, fait-elle savoir.

Avec les interviews qu’elle a réalisées dans le sillage du colloque international qui lui a été consacré, à Saint-Louis (nord du Sénégal), elle a décidé d’en faire un film de 26 minutes.

‘’J’ai remarqué que son œuvre littéraire et cinématographique, aussi immensément riche qu’elle soit, n’est pas forcément connue du grand public. Alors, j’ai décidé de faire carrément un film avec les nombreuses infos que j’ai obtenues sur lui et que j’ignorais, en plus d’archives que son fils Alain m’a aidées à obtenir’’, dit-elle.

                                                                                           Lectrice précoce de Sembène

Ayant découvert Sembène, auteur classique de la littérature africaine, au collège grâce à ses romans, ”Ô pays, mon beau peuple !” et surtout ”Les bouts de bois de Dieu”, son ‘’favori’’, qui relate la grève des cheminots du train Dakar-Niger, en 1947,  la réalisatrice qui est originaire de Thiès, là où se déroule la trame du livre, a ‘’très tôt été fascinée par Sembène”. De plus, ‘’je suis issue d’une famille de cheminots’’, ajoute-t-elle avec un brin de fierté.

”Sembène, la plume et la caméra” est construit dans un style mêlant témoignages intéressants d’universitaires, de compagnons du cinéaste, d’anecdotes drôles, comme celle de ce ratage raconté par son fils Alain.

‘’Pour le personnage de Ceddo [film sorti en 1977], mon père avait choisi Joe Ouakam pour interpréter le rôle-titre. Un véhicule était mis à la disposition des acteurs pour rallier Thiès, où devait avoir lieu le tournage, mais ce dernier avait dit qu’il viendrait seul et… à vélo. Sembène a dû accepter à contrecœur. Mais le jour-J, même pas l’ombre de Joe, qui fit faux bond, au grand dam de Sembène ’’, sourit encore Alain.

A travers son documentaire, Coumba Diakhaté Mar entend, à sa manière, rendre hommage à celui qu’on appelait affectueusement ‘’l’aîné des anciens’’, l’ancien docker au port de Marseille – une activité qui a inspiré son roman ”Le docker noir”, son premier roman publié en 1956.

Avec ce premier pas dans le monde de la réalisation cinématographique, la journaliste qui ‘’ne [se définit] pas trop comme réalisatrice’’, espère que ce coup d’essai se transforme en coup de maître, et qu’il lui mette définitivement le pied à l’étrier. Sans pour autant la détourner du journalisme sportif, son domaine de prédilection.

ABB/AKS/OID

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