SENEGAL-UNVERSITE-RECHERCHE
Par Adama Diouf Ly
Diamniadio, 4 juin (APS) – La Cité du savoir de Diamniadio, constituée de ”bâtiments intelligents et futuristes tournés vers l’innovation’’ au cœur du pôle urbain, a pris forme, avec ses différents services dédiés principalement au rayonnement de l’enseignement supérieur et de la recherche qui ont même déjà commencé à fonctionner.
Elle est aménagée sur un site fermé de 14 hectares du Pôle urbain de Diamniadio, dans le département de Rufisque, à 30 kilomètres de Dakar. Elle regroupe des services et supports, conçus en vue d’‘’une meilleure synergie entre l’enseignement supérieur, la recherche et le monde de l’entreprise’’.
Celui-ci abrite également un Data Center, des instituts de recherche, des incubateurs de startups technologiques, ainsi qu’une médiathèque et un espace administratif.
La Cité du savoir compte aussi parmi ses merveilles l’Institut de recherche en santé, de surveillance épidémiologique et de formations (IRESSEF). Installé sur une partie reculée du site, il joue un rôle d’incubateur pour les étudiants de l’ISEP pour certaines filières.
L’université Amadou Mactar Mbow (UAM), implantée à côté du stade Abdoulaye Wade, est également considérée comme faisant ”partie intégrante de la Cité du savoir”.
”L’objectif est de créer des synergies entre chercheurs, étudiants, entrepreneurs et industriels, dans un environnement propice à l’innovation locale et à l’ouverture internationale’’, explique Fary Sèye, le secrétaire général du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation dont dépend la plupart des infrastructures.
‘’Il s’agit d’un ambitieux programme destiné à propulser le Sénégal dans l’économie du savoir avec, à la fois, un pôle scientifique et technologique de pointe et un creuset d’excellence pour la recherche, l’innovation et la formation supérieure’’, explique-t-il.
La Cité du savoir est ainsi conçue pour rassembler des infrastructures de recherche, des centres d’enseignement supérieur et des services supports pour une meilleure synergie entre les acteurs.
Un environnement paysager futuriste
Bien plus qu’un ensemble d’infrastructures dédiées à l’enseignement supérieur et à la recherche, elle est conçue comme un espace urbain moderne, intelligent et durable. Chaque détail architectural vise, en effet, à encourager l’innovation tout en respectant l’environnement, selon Moustapha Gaye, membre du comité de conception.
‘’Chaque bâtiment a été conçu comme un espace de rencontre entre enseignants, chercheurs, étudiants, entrepreneurs, etc., mais aussi entre l’homme et la nature’’, explique l’urbaniste sénégalais.
La dimension écologique est au cœur du projet, avec de nombreux espaces verts aménagés : jardins botaniques mettant en valeur la flore locale, bassins de rétention d’eau intégrés au paysage et potagers pédagogiques pour les projets ‘’agro-tech’’ des étudiants.
‘’Ces aménagements offrent à la fois un cadre agréable et une véritable fonction de recherche appliquée dans les domaines de l’agroécologie, de la biodiversité urbaine ou de la gestion durable des ressources’’, indique Moustapha Gaye.
Le site s’étend sur plusieurs dizaines d’hectares dans la ville nouvelle de Diamniadio. Le plan d’aménagement est structuré en zones fonctionnelles : campus universitaires, instituts de recherche, incubateurs de startups, espaces de coworking, pôles technologiques, ainsi que des résidences d’étudiants et un centre de conférences. Tous ces chantiers ne sont cependant pas encore tous sortis de terre.
Les bâtiments, déjà fonctionnels, présentent une architecture futuriste, avec des volumes ouverts, des façades vitrées, comme le siège de l’Université numérique Cheik-Hamidou-Kâne.
L’ISEP, au cœur du dispositif
Initiée en 2018, la Cité du savoir accueille aujourd’hui l’Institut supérieur d’enseignement professionnel de Diamniadio (ISEP), les infrastructures du Système intégré de gouvernance de l’enseignement supérieur et de la recherche, dédiées à la gestion automatisée du processus d’orientation des nouveaux bacheliers vers les établissements d’enseignement supérieur (CAMPUSEN). L’ISEP a délivré des diplômes à ses premières promotions en 2024.
Au cœur du dispositif, l’ISEP de Diamniadio joue un rôle clef dans l’adéquation formation-emploi. Mettant l’accent sur les compétences pratiques dans les domaines du numérique, de l’agro-industrie et de la logistique, il attire de plus en plus de jeunes désireux d’intégrer rapidement le marché du travail.
Les étudiants de l’ISEP sont formés, en deux ans, dans divers domaines des sciences et technologies, à savoir la robotique, l’intelligence artificielle, le Big Data, la génétique moléculaire, la simulation, le calcul scientifique, la cybersécurité, le froid et la climatisation, la mécanique, entre autres.
‘’L’ISEP incarne la nouvelle génération d’établissements axés sur les compétences. Ici, on forme pour l’emploi réel, avec un fort ancrage technologique et entrepreneurial’’, fait savoir Malick Faye, le directeur adjoint de l’institut.
Aujourd’hui, l’ISEP a noué une convention avec l’IRESSEF, implanté de l’autre côté du site.
Séparés par la grande route qui divise le pôle en deux parties, les bâtiments des deux institutions se font face. C’est ce qui explique l’option pour les deux parties d’aller vers ‘’une collaboration qui bénéficiera aux étudiants de l’ISEP mais également à l’institut de recherche’’.
‘’IRESSEF sera ainsi à la disposition de l’ISEP dans la mesure du possible pour vous accompagner dans plusieurs domaines, comme la formation de techniciens biomédicaux, l’encadrement des étudiants et la mise à disposition de nos locaux pour les ateliers et examens, entre autres’’, avait indiqué son directeur, le professeur Souleymane Mboup, lors de la cérémonie de signature tenue dans les locaux de l’ISEP de Diamniadio, en mai 2024.
L’Institut de recherche médicale bénéficie ainsi des compétences des étudiants de l’ISEP, notamment dans le domaine de l’informatique, de l’automobile par la gestion de son parc automobile, mais également de l’efficacité énergétique.
Un ‘’pool’’ de services dédié à l’innovation et au numérique
La Cité du savoir accueille également le siège de l’université numérique Cheikh-Hamidou-Kane (UNCHK), ‘’pionnière de l’enseignement à distance en Afrique francophone’’.
Dotée d’équipements de pointe en visioconférence et en production de contenus numériques, l’université entend démocratiser l’accès à l’enseignement supérieur, notamment pour les jeunes des zones rurales.
‘’Le numérique est une opportunité majeure pour désenclaver le savoir. L’université Cheikh Hamidou Kane en fait une réalité pour des milliers d’apprenants à travers le pays’’, selon professeure Aïcha Cissé.
Un autre ‘’joyau technologique’’ de la Cité est le supercalculateur national, un des plus puissants d’Afrique de l’Ouest.
‘’Grâce à cette infrastructure, il est possible de simuler des scénarios complexes, ce qui était impensable auparavant. C’est un outil stratégique pour la souveraineté scientifique du pays’’, souligne Dr Babacar Mbaye, physicien des données.
Dès sa prise de fonction, le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’innovation, Abdourahmane Diouf, a fait le tour des infrastructures de la Cité du savoir du pôle urbain de Diamniadio.
Il avait consacré une dizaine d’heures à visiter le siège de l’UNCHK, l’Institut supérieur d’enseignement professionnel Amadou-Traoré et la cyber infrastructure nationale pour l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation (CINERI).
Avec le directeur du CINERI, Ousmane Thiaré, ancien recteur de l’université Gaston-Berger de Saint-Louis, le ministre a recueilli les avis sur les ‘’possibilités offertes par la technologie de pointe dans la structure, pour permettre d’avoir des données fiables pour faciliter toutes les prises de décisions sur l’enseignement supérieur’’.
Installé en partenariat avec la coopération internationale, le supercalculateur permet de traiter des volumes massifs de données, ouvrant des perspectives dans les domaines de la météo, de la génomique, de l’intelligence artificielle, ou encore de la modélisation climatique, a expliqué son directeur.
Avec ses laboratoires, ses incubateurs de startups, et ses infrastructures de télécommunications de dernière génération, la Cité du savoir devient progressivement un pôle d’attraction régional, accueillant chercheurs, innovateurs, étudiants et entrepreneurs de toute l’Afrique de l’Ouest.
‘’Ce qui se joue ici, c’est plus qu’un projet d’infrastructures. C’est une vision du futur, centrée sur le savoir, la jeunesse et l’innovation responsable’’, résume l’expert en politiques de recherche, le professeur Amadou Kane.
La Cité du savoir est une réponse stratégique à la nécessité d’ancrer la recherche dans les réalités du développement national. Elle favorise la co-construction des savoirs entre chercheurs, innovateurs et utilisateurs finaux, a-t -il ajouté.
Dotée d’infrastructures modernes – laboratoires, espaces de coworking, bibliothèques numériques, centres de calcul – la Cité du savoir attire déjà des partenariats internationaux. Le Centre africain d’intelligence artificielle (CAIA), installé récemment sur le site, travaille par exemple avec des chercheurs français et canadiens sur des solutions d’IA pour l’agriculture et la santé.
‘’Ici, on peut développer un prototype, le tester sur le terrain à Kaolack ou Thiès, puis revenir pour l’améliorer. Le cycle de l’innovation est raccourci’’, signale l’ingénieur et cofondateur de la startup ‘’AgriTech’’, établi sur le site.
La Cité du savoir est appelée à devenir un pôle régional de référence, attirant des étudiants et des chercheurs de toute la sous-région.
‘’C’est une rupture nécessaire avec la logique d’importation des savoirs. Ici, nous produisons de la connaissance utile, contextualisée et exportable’’, selon un conseiller scientifique du ministère de l’Enseignement supérieur.
La Cité du savoir mise sur l’économie numérique, la recherche et l’éducation comme leviers de croissance.
Le défi reste cependant de ‘’garantir un financement durable et d’assurer l’inclusion de tous les acteurs du site’’, explique le conseiller scientifique.
‘’Pour sa réussite, cette initiative doit éviter de devenir une +tour d’ivoire+ technologique. Il faut garder le lien avec les communautés, les entreprises locales, les besoins réels du pays’’, suggère-t-il.
Un site encore en ‘’chantier’’
Alors que les chantiers continuent d’émerger, le défi pour les années à venir sera d’assurer la pérennité financière, le renforcement des capacités humaines et surtout une intégration inclusive des différentes infrastructures.
A son lancement en 2018, en dehors des infrastructures aujourd’hui fonctionnelles, il était prévu dans un document du Bureau opérationnel de suivi (BOS) du Plan Sénégal émergent, le référentiel des politiques publiques de l’ancien régime, un ‘’quartier des écoles’’ pour abriter les extensions de nombreux établissements privés d’enseignement supérieur.
Pour le volet gouvernance et évaluation de l’enseignement supérieur, dans ses projections initiales, la Cité du savoir devrait également accueillir les sièges du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation ; de l’Autorité nationale d’assurance qualité de l’enseignement supérieur, ou encore de l’Office du baccalauréat.
Un plan prévoit également ‘’un espace tourné vers la promotion de la culture scientifique’’ avec la ‘’Maison de la science’’ qui comprendra un planétarium, un aquarium, un observatoire astronomique, un espace de démonstration scientifique et technique.
ADL/MF/SKS/ASG/ASB/ABB