SENEGAL-MONDE-CULTURE
Dakar, 18 déc (APS) – Le penseur et militant anticolonialiste martiniquais Frantz Fanon (1925-1961) incarnait une vision militante de la décolonisation alliant théorie et action, a soutenu sa fille et présidente de la fondation portant son nom, Mireille Fanon Mendes-France.
”Avec cette année du centenaire, alors que l’approbation avait entamé par l’appel lancé en 2021, un travail de réflexion sur la décolonialité combative, plus précisément le passage de la responsabilité individuelle à la responsabilité collective, il était important d’affirmer que Fanon incarnait une vision militante de la décolonisation, alliant théorie et action”, a-t-elle déclaré.
La présidente de la fondation Frantz Fanon intervenait à la cérémonie marquant l’ouverture officielle d’un colloque international sur le centenaire de son père, mercredi à Dakar, en présence du Premier ministre, Ousmane Sonko, et d’autres membres du gouvernement sénégalais.
Cette rencontre de quatre jours, portant sur le thème ”L’espérance africaine”, enregistre la participation de plusieurs représentants du corps diplomatiques et de délégations venues de 23 pays d’Afrique et du monde.
”Par sa vie, par son engagement, Frantz Fanon s’est opposé à la fragmentation que la figure du médecin ou de l’intellectuel”, a souligné la présidente de la Fondation Frantz Fanon.
Selon Mireille Fanon Mendes-France, la fragmentation des domaines du savoir que la pensée de Frantz Fanon vient contester, fait le lien entre ”les névrosés qu’il observe et le contexte social”, mais aussi entre ”la pratique thérapeutique et la libération politique collective”.
”Il engage la pensée d’une praxis révolutionnaire, non comme un acte historique, mais en tant qu’action située dans le temps historiquement et culturellement, afin que la psyché aliénée par le colonialisme se transforme en une force révolutionnaire visant à construire, à la fin du monde du fou”, a ajouté Mme Mendes-France.
Elle indique que la combativité dont parle Fanon, exige des actes de ”transgression et de renoncement similaires aux normes établies de reconnaissance et de mérite”, une perspective qui ”transcende le désir des reconnaissances”.
A la différence de la critique, a poursuivi la présidente de la Fondation Frantz Fanon, ”la combativité émerge lorsque des personnes racialisées s’adressent aux autres racialisées, afin de créer un sentiment de lutte collective”.
Elle estime que cette réflexion s’inscrit dans le contexte du renouveau des mouvements antiracistes et coloniaux à travers le monde, et constitue une réponse aux mutations démographiques des pays, tout comme des menaces pour les autres.
”Cette posture réflexive exige la volonté et la capacité de se connecter aux autres afin de s’engager dans un mouvement collectif contre la colonialité, quelle que soit sa forme, au dynamisme d’une pensée permettant de penser autrement les rapports de force”, a-t-elle fait valoir.
Le directeur général du Musée des civilisations noires (MCN), Mouhamed Abdallah Ly, a rappelé, à propos des missions et des générations, la pensée de Frantz Fanon, selon laquelle “chaque génération, dans une relative opacité, doit découvrir sa mission, la remplir ou la trahir”.
À l’en croire, la participation au dernier grand événement du centenaire de ”l’ancien noir”, vise justement à “embrasser l’horizon de cette mission historique que les parties prenantes donneront la peine d’ancrer, de préciser et de projeter sur le toit du monde”.
Frantz Fanon, né le 20 juillet 1925 en Martinique, était un psychiatre et philosophe politique de la colonie française, décédé en 1961 dans le Maryland, aux Etats-Unis.
Ses travaux ont exercé une influence considérable sur les études post coloniales et la théorie critique.
Il était également un militant politique radical et panafricaniste préoccupé par la psychopathologie de la colonisation ainsi que les conséquences humaines, sociales et culturelles de la décolonisation.
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