SENEGAL-PECHE
Du correspondant de l’APS à Sédhiou, Oumar Baldé
Sédhiou, 17 juil (APS) – Des pêcheurs basés dans la région de Sédhiou (sud) et exerçant sur la rive droite du fleuve Casamance utilisent des filets de pêche en monofilament, au risque de mettre en péril l’équilibre écologique et économique dans cette région naturelle, alertent des observateurs dont des professionnels du secteur.
L’utilisation de ces filets pose en effet un problème majeur, car menaçant la durabilité des ressources halieutiques dans l’ensemble de la région et au-delà, sur tout le fleuve Casamance.
Sur cette partie du fleuve, les crevettes et les carpes sont parmi les produits les plus prisés par les pêcheurs.
Ici, même si la pêche est souvent pratiquée pour l’autoconsommation familiale et le petit commerce, certains pêcheurs n’hésitent pas à s’affranchir des règles pour se livrer à des pratiques de pêche non conventionnelle. Ils vont jusqu’à capturer quantité de petits poissons, au risque de mettre en péril l’équilibre écologique.
Souleymane Kouyaté, un notable établi de longue date à Sédhiou, exprime son inquiétude face à la ‘’ dégradation’’ des ressources halieutiques du fleuve Casamance. Il dit avoir observé que les petits poissons sont jetés de manière inconsidérée. Il déplore ce comportement qui menace l’équilibre écologique et économique de la région.
La pêche, une activité essentielle à Sédhiou
Selon lui, le gouvernement doit agir rapidement pour empêcher des pêcheurs étrangers de piller la ressource.
Au dire d’un homme ayant requis l’anonymat, la pêche, activité essentielle à Sédhiou, est largement dominée par des acteurs venant de la sous-région.
‘’Ces pêcheurs, de diverses nationalités, exploitent les eaux locales de manière non contrôlée, notamment celles du fleuve de Sédhiou, pour mener leurs activités’’, dénonce cet homme d’une cinquantaine d’années.
A en croire Arfan Mané, un jeune pêcheur, la grande majorité des acteurs de la pêche s’activant dans la région seraient originaires du Mali.
Leurs épouses et des femmes de la région joueraient selon lui un rôle clé dans la commercialisation des poissons capturés, qu’elles écoulent sur les marchés locaux, confie-t-il.
Pour Arfan Mané, la pêche est bien plus qu’une activité économique. Elle est constitutive de l’identité même de Sédhiou. Sans cette activité, dit-il, beaucoup de gens n’auraient jamais eu l’occasion de découvrir et de connaître cette ville.
Son témoignage met en lumière les défis auxquels la région reste confrontée, dont les plus pressants sont la surexploitation des ressources halieutiques par des acteurs étrangers et l’absence de mesures efficaces pour protéger ces ressources vitales.
‘’Face à cette situation, il est impératif de renforcer la réglementation et la surveillance des activités de pêche dans la région. Une gestion durable des ressources halieutiques est essentielle pour préserver l’économie locale et garantir un avenir viable pour les générations futures’’, estime-t-il.
L’appel d’Arfan Kouyaté résonne comme un ‘’cri d’alarme’’ en ce qu’il invite les autorités à agir sans délai.
Surexploitation des ressources halieutiques
La pêche illicite et non réglementée, souvent pratiquée par certains pécheurs, contribue à la raréfaction des ressources halieutiques.
Serigne Thiam, l’inspecteur régional des pêches et de la surveillance de Sédhiou, ne cache pas son opposition à l’utilisation des filets en monofilament. Avec de telles méthodes, des petits poissons sont pêchés des eaux du fleuve ‘’sous nos yeux impuissants’’, dénonce-t-il.
Selon lui, différents types de pêche sont pratiqués dans la région et les crevettes et les carpes sont particulièrement recherchées par les pêcheurs.
Serigne Thiam indique que des services régionaux de la pêche veillent quotidiennement au grain pour empêcher le bradage des ressources halieutiques. Il déplore notamment l’insuffisance des moyens logistiques et du personnel du service des pêches.
Il rappelle à cet égard la mise des conseils locaux de la pêche artisanale (CLPA), des instances regroupant pêcheurs et mareyeurs, dans le but de préserver les ressources halieutiques.
‘’Nous peinons à [assurer] le contrôle comme il se doit dans le fleuve faute de moyens logistiques et de ressources humaines’’, déplore-t-il.
Il précise que son service ne compte que quatre agents pour toute la région.
Aussi plaide-t-il pour un renforcement du personne dans certaines zones éloignées de la capitale régionale comme Marsassoum et Djirédji.
Il pense que pour redynamiser et réglementer le secteur de la pêche, le personnel ainsi que les moyens roulants doivent être renforcés. Il recommande aussi de revoir le code de la pêche.
L’inspecteur régional de la pêche et de la surveillance de Sédhiou préconise également de substituer d’autres pratiques à l’utilisation des filets en monofilament par les pêcheurs artisanaux.
‘’Si les acteurs n’ont plus accès à ces filets monofilaments, ils ne pourront pas pêcher‘’, fait-il valoir.
Serigne Thiam exhorte dans cette perspective les populations à penser aux générations futures, pour ainsi adopter des pratiques durables en vue de garantir la pérennité des ressources halieutiques dans la région de Sédhiou.
En attendant, certains mareyeurs réclament de meilleures conditions de travail.
Ils souhaitent notamment disposer de caisses de pesage standardisées et de camions frigorifiques.
De même réclament-ils un fonctionnement correct du quai de pêche de Goudomp, afin de faciliter le transport et la commercialisation des produits halieutiques.
Ils estiment que le manque criant de glace et de chambres froides dans les zones de pêche compromet gravement la conservation des poissons, situation qui, à les en croire, entraine des pertes économiques importantes et une baisse de la qualité des produits.
OB/ASB/ASG/OID