SENEGAL-PECHE
Dakar, 3 juil (APS) – Des mesures urgentes doivent être prises pour une application des textes en vigueur de façon à mettre un terme aux ravages causés par le chalutage de fond sur les ressources marines, a déclaré, jeudi, Mamadou Diop Thioune, chargé de la communication au Conseil national interprofessionnel de la pêche artisanale au Sénégal (CONIPAS).
Le chalutage gratte les substrats meubles et rocheux marins pour capturer les espèces démersales, détruisant ainsi les écosystèmes marins.
“L’inaction prolongée face à une pratique de pêche illicite, illégale et non déclarée est responsable de la raréfaction des ressources et de la destruction des écosystèmes marins”, a-t-il notamment dit.
Il intervenait en marge d’un atelier de sensibilisation des acteurs de la pêche et de plaidoyer sur l’impact négatif des chaluts de fond au Sénégal, organisé par le Conseil national interprofessionnel de la pêche artisanale au Sénégal, en partenariat avec l’organisation Blue Venture Conservation (BVC).
Selon Mamadou Diop Thioune, le chalutage est l’un des facteurs les plus destructeurs que le Sénégal connaît.
Il a conduit à une dégradation totale des habitats, des zones de reproduction, et jusqu’à présent, aucune mesure adéquate n’a été prise pour l’éradiquer, a-t-il regretté.
Il a rappelé que le Sénégal a longtemps bénéficié d’une abondance halieutique qui s’effondre désormais sous les coups répétés d’une exploitation industrielle incontrôlée.
“Nous avons dénoncé cette situation depuis des années, mais les décisions n’ont pas suivi”, s’est-il désolé le chargé de la communication au CONIPAS.
Mamadou Diop Thioune a appelé à une prise de conscience collective des des pays de pêche, afin de “retirer les bateaux destructeurs de nos mers”.
Il a insisté sur la nécessité de renforcer la surveillance, d’appliquer les textes “sans complaisance” et de mettre fin à la tolérance des infractions qui, selon lui, est à l’origine de la situation actuelle.
“Le poisson est renouvelable, mais il n’est pas inépuisable. Et si rien n’est fait, l’erreur que nous commettons aujourd’hui sera irréparable”, a averti le secrétaire général de l’Union nationale des mareyeurs, également membre du conseil d’administration du CONIPAS.
Il a par ailleurs plaidé pour une gouvernance plus transparente du secteur.
“Nous voulons une information claire, institutionnelle, sur ce qui se fait, pourquoi cela se fait, et avec quels moyens. Nous exigeons d’être associés aux décisions, car nous sommes en première ligne, dans la co-gestion et la co-surveillance”, a-t-il insisté.
Mamadou Diop Thioune a appelé à une solidarité renforcée entre les pêcheurs artisanaux et les autorités pour faire front commun face aux pratiques de chalutage intensif, en misant sur l’expertise locale, la responsabilisation des acteurs et l’application rigoureuse des lois.
De son côté, Abdoulaye Ndiaye, chargé de campagne et plaidoyer à Blue Ventures Conservation, a plaidé pour l’instauration d’une zone d’exclusion de la pêche industrielle à douze mille marins au large des côtes sénégalaises. Il estime qu’une telle mesure s’impose comme un levier prioritaire et stratégique.
Selon lui, l’instauration d’une telle zone permettrait non seulement de protéger les ressources halieutiques, mais aussi de garantir aux pêcheurs artisanaux le droit fondamental de vivre de la mer “dans la dignité et dans la durabilité”.
Il a évoqué l’exemple du Ghana, qui a récemment réservé toute sa zone côtière à la pêche artisanale.
“Ce serait une excellente avancée si le Sénégal emboîtait le pas [au Ghana]. Le chalutage de fond est aujourd’hui décrié au niveau mondial pour les dommages qu’il cause aux écosystèmes marins. Il doit être banni des pratiques de pêche”, a-t-il affirmé.
Il a appelé à la publication systématique des licences, des accords de pêche et des données de surveillance. Il considère que “la transparence est notre meilleur allié pour restaurer la confiance, responsabiliser les acteurs et garantir une gestion équitable des ressources marines”.
Abdoulaye Ndiaye a en outre souligné l’importance d’impliquer directement les communautés concernées, notamment les pêcheurs, les femmes transformatrices et les jeunes du littoral dans la gouvernance, la surveillance et le plaidoyer en matière de pêche.
Il a rappelé l’importance des innovations technologiques qui permettent de mieux suivre les navires industriels, en facilitant la surveillance satellitaire en temps réel.
Des représentants des communautés côtières, des membres de la société civile, des universitaires et des partenaires techniques ont pris part à la rencontre.
AN/ASG/BK