Amsatou Sow Sidibé appelle à une concertation sur la loi d’amnistie
Amsatou Sow Sidibé appelle à une concertation sur la loi d’amnistie

SENEGAL-POLITIQUE-JUSTICE

Dakar, 27 mars (APS) – La présidente de la Commission nationale des droits de l’homme du Sénégal (CNDHS), Amsatou Sow Sidibé, a appelé, jeudi, à une large concertation sur la loi d’amnistie, objet de profondes divergences depuis son adoption en février 2024.

‘’Nous avons observé qu’il y avait des tiraillements, nous préférons qu’il y ait une concertation. […] Nous voulons qu’il y ait une concertation, un dialogue autour de cette question’’, a-t-elle déclaré.

Elle s’exprimait lors d’une journée de réflexion sur la loi d’amnistie qui, selon elle, ‘’est essentielle pour l’État de droit, la démocratie et les droits humains au Sénégal’’.

Le député Amadou Ba du groupe parlementaire des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef-Les Patriotes) a soumis une proposition de loi portant interprétation de la loi d’amnistie afin de délimiter les champs d’application de cette loi votée par le régime de Macky Sall.

Cette proposition de loi a soulevé des réactions au sein de l’opposition et de la société civile, qui interpellent les nouvelles autorités sur leur engagement pour une abrogation totale du texte qui couvre les faits qui se sont déroulés entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024.

La journée de réflexion a réuni des acteurs de la société civile, des avocats, magistrats, parlementaires, spécialistes du droit, défenseurs des droits de l’Homme dans un contexte particulier où le pays ‘’s’efforce de se concilier réconciliation nationale et respect des obligations internationales’’, selon Mme Sidibé.

La présidente de la CDHS a rappelé les douloureux évènements qui ont été à l’origine de cette loi d’amnistie votée par l’Assemblée nationale, le 26 février 2024.

‘’Entre 2021 et 2024, le Sénégal a traversé une phase délicate de son histoire politique. Une période caractérisée par des crises répétées et des violences découlant de manifestations politiques (plus de 65 morts et 1000 blessés, sans parler de la destruction massive de biens publics et privés)’’, a-t-elle indiqué.

Amsatou Sow Sidibé a également rappelé l’arrestation d’environ 2000 personnes, notamment des membres de l’opposition, des journalistes, des activistes, des manifestants.

‘’Afin d’apaiser le climat politico-social et de renforcer la cohésion sociale, l’Assemblée nationale a voté une loi d’amnistie, le 26 février 2024. Celle-ci couvre toutes les infractions criminelles et correctionnelles liées aux manifestations politiques entre février 2021 et février 2024’’, a-t-elle rappelé.

Cette loi d’amnistie qui avait permis une ‘’transition pacifique’’ lors de l’élection présidentielle de 2024 soulève aussi aujourd’hui ‘’des questions quant à sa portée et son impact’’, a t-elle dit.

Pour Mme Sidibé, cette loi d’amnistie est ”sérieuse’’ et ne doit donc pas être abordée dans la précipitation.

Le représentant régional du Haut-Commissariat des nations unies des droits de l’homme pour l’Afrique de l’Ouest (BRAO), Robert Kothani, a déploré l’absence de ‘’rapport public’’ sur les enquêtes liées aux évènements à l’origine du vote de la loi d’amnistie.

‘’Dans un pays aussi organisé que le Sénégal, je ne crois pas que ce qui s’est passé ait pu se passer, que le gouvernement ait présenté un livre blanc en son temps et qu’il n’y a pas eu d’enquête. Je suis sûr qu’il y a eu des enquêtes mais ces enquêtes n’ont pas été rendues publiques”, a-t-il avancé.

Il estime que dans de telles circonstances, ‘’la réédition’’ des comptes est essentielle pour situer les responsabilités, notamment en matière de droits humains.

‘’Le gouvernement actuel du Sénégal a publiquement posé la question de la remise en cause de la loi d’amnistie, qui semble faire le lit de l’impunité suite aux événements douloureux survenus en 2021 et 2024’’, a insisté le fonctionnaire des Nations unies.

Le Pr Ndioro Ndiaye, présidente de l’Alliance pour la migration, le leadership et le développement (AMLD), estime que les juristes doivent dire le droit pour aider les populations à comprendre la loi d’amnistie.

‘’Cette loi d’amnistie est à comprendre et à expliquer et à faire comprendre à nos populations. Si un dialogue se dessine entre non seulement les protagonistes, mais aussi entre les protagonistes et le reste de la société, je pense que nous tous nous aurons à y gagner’’, a souligné l’ancienne ministre de la Femme.

Ogo Seck, professeur titulaire des universités, agrégé en histoire du droit et des institutions, a soulevé des interrogations sur ‘’les conséquences graves’’ pouvant découler de la révision de cette loi d’amnistie notamment sur ‘’la stabilité politique’’ de l’Etat.

‘’La révision de cette loi pourrait entraîner des conséquences graves sur le fonctionnement de l’État. […]. Le respect des institutions également se pose parce que la question vient de l’Assemblée. Mais, la question est sortie aujourd’hui de l’Assemblée. Jusqu’où elle va aller ? Est-ce qu’on ne va pas aller vers un référendum ? On ne sait pas encore’’, s’est-il interrogé.

Pour lui, les problématiques relatives aux droits acquis et au respect des conventions internationales doivent faire l’objet de réflexion.

La journée de réflexion est marquée par des panels sur les droits de l’homme dans les contextes de crise, la présentation et les incidences de la loi d’amnistie au Sénégal, l’état de la jurisprudence nationale et internationale sur l’amnistie, l’application de la loi d’amnistie.

Avocats, magistrats, parlementaires, spécialistes du droit, organisations de la société civile, défenseurs des droits de l’Homme vont également plancher sur l’opportunité d’abroger la loi sur l’amnistie.

FD/OID/ASG

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