SENEGAL-COLLECTIVITES-REPORTAGE
Par Cheikh Moussa Sarr
Dakar, 30 juil (APS) – La problématique des inondations au Sénégal, particulièrement à Dakar, est due à une combinaison de facteurs naturels et humains. Les fortes précipitations, exacerbées par le changement climatique, ainsi que l’urbanisation rapide et anarchique, la destruction des zones humides et l’insuffisance des infrastructures d’assainissement, contribuent à la vulnérabilité du pays face aux inondations. C’est ainsi que nous nous sommes rendus à la commune de Jaxaay-Parcelles.
Cette localité située à quelques 30 kilomètres de Dakar a été créée par le président de la République d’alors, Me Abdoulaye Wade, en 2005 pour reloger les sinistrés des inondations qui habitaient Médina Gounass, Wakhinane, Nietty Mbar, entre autres. Cependant, ces expulsés pour des raisons d’inondations vivent depuis plus de 4 ans le même phénomène à Jaxaay. Les quartiers sont menacés par les eaux de la nappe phréatique. A cela s’ajoute la présence d’eau de pluies et le manque d’infrastructures pour l’évacuation de ces eaux de pluies et le drainage des eaux usées domestiques.
Le décor sur place rappelle celui qu’ils avaient connu il y’a maintenant 20 ans. Les maisons sont inaccessibles aux véhicules, à cause des canaux de drainage de fortune creusés sur les voies par le collectif focus zéro inondation. Les eaux des toilettes remontent. Certains sont obligés de trouer les murs de clôture pour permettre à l’eau d’aller vers les canaux de fortune. Suffisant donc pour dire que les populations de Jaxaay sont en train de vivre pire que ce qu’ils avaient connu à Guédiawaye, Wakhinane, Pikine et environ. Elles cohabitent avec les eaux de pluie et les eaux usées.
‘’On habitait Nietty Mbar et on a été transféré ici en 2008 à cause des inondations. Au début tout allait bien mais depuis 4 ans avec la réalisation de la route 4km400 nous souffrons des inondations. C’est la route qui a causé ce problème’’, a déclaré Kiné Ndiaye, présidente des femmes Jaxaay 1 quartier 11B.
Elle salue tout de même l’engagement des jeunes qui ont mis sur pied le collectif focus zéro inondation pour les sortir de la galère. ‘’On ne sent pas encore les autorités étatiques. C’est le collectif focus zéro inondation qui est en train de s’activer pour nous soulager. Certes le ministre Cheikh Tidiane Dièye était venu et il a posé quelques actes mais nous réclamons encore plus. Nous voulons des canalisations et c’est ce que les nouvelles autorités nous ont promis’’, dit-elle.
Pour sa part, El Hadji Ndongo Hann, président du collectif focus zéro inondation et ses membres ont retroussé les manches pour essayer toujours de trouver des solutions afin de sortir Jaxaay des eaux. ‘’L’hivernage vient à peine de démarrer et on souffre déjà. Nous avons quitté les eaux à Médina Gounass et environ pour nous retrouver encore dans la même situation. C’est vraiment inadmissible’’, s’est-il désolé.
Avant d’enchaîner : ‘’à l’époque les autorités nous avaient promis des canalisations et un cadre de vie adapté en vain. En 2018, il y’a eu des inondations et nous avions alerté. On est 71.036 habitants et nous vivons tous avec les eaux. Les toilettes sont impraticables. Les gens se lavent dans leur salon. Même pour faire leurs besoins ils ont des problèmes’’.
Il lance ainsi un appel aux nouvelles autorités afin de régler définitivement le problème des inondations à Jaxaay. Il sera conforté dans ses propos par l’imam Fall de la mosquée Jaxaay B. ‘’Les jeunes du quartier se regroupent pour trouver des solutions provisoires. Seul l’Etat du Sénégal est capable de régler ce problème parce que ces jeunes n’ont pas les moyens”, estime-t-il.
Il faut dire que la nappe phréatique a atteint un certain niveau, affectant les fosses septiques, ce qui expose à des dangers sanitaires. ”On souffre. Les eaux usées et les eaux de pluie nous fatiguent. Nos enfants sont malades à cause de ces eaux-là. Ils ont des boutons et autres maladies’’, indique Farmata Khamé Sy, une ”Bajenu gox”, marraine de quartier.
A l’en croire, les toilettes se remplissent vite et ils sont obligés de débourser tous les 15 jours la somme de 25.000 francs pour appeler le camion vidange. ”C’est la situation que nous vivons ici. Les voitures ne peuvent pas accéder à l’intérieur des quartiers. Quand il y’a un décès les jeunes prennent le corps sans vie après la prière mortuaire pour l’amener jusqu’à la route principale afin qu’on puisse le mettre dans le corbillard. C’est vraiment difficile ce que nous vivons’’, a-t-elle déclaré avec le cœur meurtri.
Les populations de Jaxaay comptent beaucoup sur le tandem Diomaye-Sonko pour mettre fin à leur calvaire.
‘’L’environnement est dégradant à cause des inondations. Il y’a un problème de santé et nous lançons un appel à l’Etat du Sénégal. Ils nous avaient soumis un projet qu’on a voté. Je suis membre du Pastef et on ne doit pas se limiter aux discours. Le ministre Cheikh Tidiane Dièye était venu mais nous voulons du concret. La mairie seule ne peut pas régler le problème. C’est à l’Etat central de régler définitivement ce problème”, a laissé entendre Abdou Lahat Diop, conseiller municipal, chargé de l’urbanisme, environnement et cadre de vie.
Lors d’une réunion du conseil des ministres, le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, a soutenu que les difficultés d’aménagement de nos communes ont accéléré le phénomène des inondations et augmenté les besoins en infrastructures d’assainissement. Il a demandé au Premier ministre et au ministre de l’Hydraulique et de l’Assainissement d’intensifier, avec la Brigade nationale des Sapeurs-pompiers et l’ensemble des services de l’Etat mobilisés, le déploiement efficace des dispositifs de prévention et de gestion des inondations dans les localités touchées.
Il a souligné, en outre, la nécessité de mobiliser, en mode alerte, les mécanismes publics de solidarité nationale pour assister les populations sinistrées en relation avec les autorités administratives. Le président de la République a demandé au Premier ministre d’évaluer les actions de lutte contre les inondations déroulées dans cette dernière décennie pour ensuite engager une réorientation de la stratégie nationale d’assainissement en cohérence avec le renouveau des politiques en matière d’aménagement du territoire, d’urbanisme et d’habitat.
Il a, à ce titre, invité le Premier ministre à procéder à l’actualisation et à la généralisation des Plans directeurs d’Assainissement (PDA) et de lui proposer un nouveau Programme intégré de Développement de l’Assainissement (PIDA).
CMS/OID/SKS/ASB