A Bakel, la résilience d’un producteur après la furie des inondations
A Bakel, la résilience d’un producteur après la furie des inondations

SENEGAL-AGRICULTURE-REPORTAGE

Bakel, 13 nov (APS) – La violence des dernières inondations dans le département de Bakel (est) se traduit dans les 946 hectares d’exploitation agricole submergés par les eaux. Malgré l’ampleur des dégâts, certains producteurs tentent de se relancer avec les cultures de décrue, quelques semaines après le déchaînement de la nature.

Djibril Konaté, parmi d’autres, symbolise toute la résilience de ces producteurs dont la persévérance témoigne d’une foi inébranlable dans l’adage selon lequel la terre ne ment pas.

En cette matinée de mercredi, sous un air frais, les habitants de Bakel semblent pour la plupart fortement absorbés par leurs activités quotidiennes.

Il faut quitter la ville, en moto, pour rejoindre Djibril Konaté à “Fololaqué”, les zones dédiées à l’agriculture, à environ 4 kilomètres à l’est de Bakel.

Sur le trajet, des personnes majoritairement à pied choisissent des raccourcis pour arriver tôt dans leurs périmètres avant que le soleil ne se lève.

‎A “Falolaqué”, les stigmates de la furie des inondations sont toujours présents. De nombreuses parcelles de piments, poivrons, mil, concombres, en phase de récolte pour la plupart, ont été dévastées par les eaux.

Du piment muri sur des tiges sèches, des épis de mil sur des pédoncules et autres épices en maturation détériorées : c’est le triste décor qui accueille le visiteur, une situation presque similaire à celle de l’année 2024.

A Bakel, la résilience d'un producteur après la furie des inondations

“L’année dernière, j’étais vers les bas-fonds et les inondations avaient tout emporté. Cette année aussi, bien que mon périmètre soit situé en altitude, j’ai perdu mes productions aussi. Ces inondations ont coïncidé avec la période de récolte du piment, du mil, et du poivron”, se désole Djiby Konaté.

Le producteur quinquagénaire n’a finalement pas pu profiter comme il faut de la période de récolte qui n’a duré que deux mois contre six habituellement.

Le reste se résume en une dette à rembourser à la banque malgré tout, après les pertes de récolte.

“Pour aller en campagne agricole, il faut au préalable contracter des prêts auprès des institutions financières. On a beaucoup pris, tout allait à merveille, mais malheureusement l’eau est venue et a tout emporté. On est obligé de reprendre les activités à zéro”, regrette M. Konaté, qui avait contracté 1,5 million de francs CFA en prêt.

Une relance des activités avec l’appui des amis

‎”Vous savez la banque ne donne pas deux fois, il faut d’abord payer pour bénéficier d’un autre prêt. Ce qui était difficile avec ma situation. Pour me relancer avec la culture de décrue, j’ai bénéficié de l’appui financier des amis, avec un moment de 500.000 FCFA sous forme de prêt aussi”, a-t-il précisé.

Avec cette somme, Djiby Konaté a passé des commandes d’alvéoles en piment et tomates depuis Dakar pour faire le repiquage.

D’un hectare cinquante avant les inondations, il se relance avec 0,65 ha avec des spéculations comme le poivron, la tomate et des arbres fruitiers.

“J’exploitais 1,5 hectare avant, après les inondations j’exploite maintenant 0,65 ha. En plus de l’oignon et du piment, j’ai planté également des citronniers. J’en avais 50, mais seuls 42 sont sauvés. Je cultive également la tomate, le poivron”, signale le quinquagénaire.

Sur son périmètre maraîcher, les travaux se poursuivent toujours.

A Bakel, la résilience d'un producteur après la furie des inondations

Sept jeunes enrôlés pour l’occasion s’activent dans le désherbage et l’aménagement des parcelles devant servir pour le repiquage des oignons qui ont déjà pris forme dans des pépinières.

Le site, situé à un kilomètre du fleuve Sénégal, est confronté à un manque d’eau. Un puit de 11 mètres de profondeur lui a été construit par une organisation non gouvernementale (ONG) islamique par l’intermédiaire d’un de ses amis, dit-il.

“Ici, c’est une nouvelle zone de culture. L’accès à l’eau constitue un problème, je voulais un forage, mais l’ONG s’active uniquement dans la réalisation de puits. Je n’ai apporté que 10% [des fonds nécessaires], et eux, ils ont fait le reste dont la pompe émergente et le panneau solaire. Mais, il n’y a pas que moi qui m’en sert, les voisins producteurs viennent ici pour puiser de l’eau”, s’est réjoui le producteur horticole.

‎Misant sur le système d’irrigation dit californien, qui réduit considérablement les pertes d’eau, Djiby Konaté souligne que cette démarche s’explique par un manque de moyens, ce qui l’a conduit à opter pour le goutte-à-goutte, considéré comme plus approprié pour la culture horticole.

Avec la dette contractée à la banque, il se fait l’avocat des producteurs et appelle les autorités au secours.

‎”La dette est toujours là. Par conséquent, nous demandons à l’État de voir avec les institutions financières comment nous aider à alléger la dette ou faire des moratoires, afin qu’on puisse accéder à d’autres crédits, après avoir perdu nos cultures”, a insisté Djiby Konaté.

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‎AND/ABD/HB/BK