Thiès, 7 fév (APS) – Des acteurs issus de divers secteurs planchent à Thiès sur l’avant-projet de loi portant Code de la publicité, à travers un toilettage des textes juridiques régissant cette activité, afin de les adapter aux mutations surtout d’ordre numérique, intervenues au Sénégal et dans le monde.

Après une première journée pendant laquelle des juristes se sont retrouvés pour déterminer l’opportunité ou non d’intégrer des amendements proposés par divers acteurs, ces derniers ont épluché, jeudi, avec des juristes, tous les articles pour s’assurer que leurs préoccupations ont été prises en charge.

Le processus de révision avait démarré le 3 janvier dernier à Dakar. A cette occasion, les parties prenantes avaient proposé des amendements au texte qui leur a été soumis.

Selon Amadou Kanouté, chef de la Division presse et information du ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique, les textes encadrant la pratique de la publicité au Sénégal remontent à 1964 et 1983.

Pour M. Kanouté, cet atelier de consolidation de l’avant-projet de loi sur la publicité, datant de 2000, se veut un séminaire inclusif, avec la participation des acteurs de secteurs en liés à la publicité, dont les acteurs des médias et les régies publicitaires.

Les démembrements de l’Etat et des collectivités territoriales qui interviennent dans la publicité sont aussi représentés à cet atelier, de même que le ministère de l’Urbanisme et des agences de marketing.

« Nous savons tous que le secteur a beaucoup évolué », a fait remarquer Kanouté, notant qu’avec le contexte actuel, les lois de 1964 et de 1983 sont « complètement dépassées ».

En plus de cette loi sur la publicité, il est prévu une autre loi sur une autorité de régulation de la publicité, avec comme mission de protéger aussi bien les acteurs que les consommateurs, renseigne Amadou Kanouté, relevant que ce sont des « textes complémentaires ».

Le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) ne s’intéresse qu’à l’audiovisuel, alors qu’il y a d’autres supports médiatiques tels que la presse écrite, la presse en ligne sont à prendre en compte.

« Une vingtaine de juristes se sont déjà réunis [mercredi], avant que le reste des participants ne viennent ». Ils devaient intégrer les contributions qui ont été faites pour renforcer et actualiser les textes, selon Amadou Kanouté.

« Aujourd’hui, tous les participants sont là. La méthodologie retenue est de parcourir l’avant-projet de texte, article par article, de voir si l’ensemble des contributions ont été intégrées », a expliqué le chef de la Division presse et information au ministère de la Communication.

Dans un contexte où « tout est numérique », il faudra intégrer les réseaux sociaux, les plateformes numériques, des supports de diffusion qui impliquent beaucoup d’acteurs.

Avec les apports d’experts issus de divers secteurs, sur la base de leur expérience et d’un benchmarking, on peut arriver à un « texte révolutionnaire », espère l’officiel.

Un texte pour faire revivre le secteur de la presse

Pour Amadou Kanouté, le ministre de la Communication a fait de ce texte, comme de celui sur la régulation de la publicité, une « priorité », depuis sa prise de fonctions.

Depuis le 3 janvier, il s’évertue à « accélérer » le processus, relève-t-il, disant espérer qu’il sera bouclé d’ici la fin de l’année 2025, pour que les deux projets de loi soient soumis à l’Assemblée nationale.

Le député Adama Tandjigora, membre de la commission communication et culture de l’Assemblée nationale qui a représenté le Parlement à cette rencontre, a admis que « le secteur de la publicité connaît beaucoup de problèmes. Ça va dans tous les sens ». D’où l’importance de réfléchir au toilettage nécessaire des textes existants.

 

Il a évoqué la possibilité de donner « quelques orientations », en attendant que le texte arrive à l’Assemblée nationale.

Ibrahima Lissa Faye, président l’Association de la presse en ligne (APPEL) a salué la « belle démarche » adoptée par le ministère de la Communication en associant « tous les secteurs » et en passant en revue, un à un, les articles du texte.

« Nous sommes en train de bâtir un texte qui va nous engager et qui permettra de réglementer le secteur de la publicité », afin que tout le monde y trouve son compte, a-t-il dit, insistant sur les médias dont la publicité est la « sève nourricière ».

Il dit espérer que ces textes vont « faire revivre le secteur de la presse mais aussi l’écosystème de la communication qui vit une certaine crise depuis plus d’une dizaine d’années ».

Pour le journaliste, la crise que traverse le secteur de la presse est due, en grande partie, à « ces multinationales qui sont établies dans des pays occidentaux ou dans des pays asiatiques et qui touchent directement le marché sénégalais ».

Elles provoquent un « manque à gagner terrible » aux organes de presse, puisqu' »il y a même des Sénégalais qui font directement leur publicité à partir de ces agences-là ».

Le texte va tenter de légiférer sur ce phénomène des GAFAM, acronyme de Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft, mais « ça ne sera pas facile », selon Ibrahima Lissa Faye.

« Mettre en cohérence les textes avec la marche du monde »

Abondant dans le même sens, Matar Sylla, président du comité scientifique des Assises des médias, estime que « les médias et les ayants droit africains ne sont pas pris en compte et rémunérés ».

Il a donné l’exemple du Canada qui a pu « imposer au bout d’un certain nombre d’années de procédure, le paiement de plus de 100 millions de dollars canadiens aux ayants-droit ».

Le Sénégal devrait s’en inspirer, constituer des statistiques, pour défendre le principe selon lequel « il n’y a pas de raison que l’Afrique en général et le Sénégal en particulier, en tant que producteur de contenus qui sont fortement repris, ne soient pas rémunérés, au nom de l’équité ».

M. Sylla, ancien directeur de la Télévision nationale sénégalaise et d’autres chaines africaines et mondiales, a salué cette initiative du ministère de la Communication, consistant à « mettre en cohérence les textes qui régissent le secteur, avec la marche du monde et les mutations qui se sont opérées, pour que le Sénégal puisse tirer profit de cette activité économique importante pour les médias, les consommateurs et le pays ».

Pour lui, l’exercice auquel se prête le Sénégal, « sera utile aussi bien pour le pays que pour beaucoup d’autres pays africains ».

ADI/BK

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