Dakar, 15 jan (APS) – Des propos attribués au président français Emmanuel Macron ont été partagés sur les réseaux sociaux, Facebook et TikTok notamment, en lien avec le débat autour de l’avenir des bases militaires françaises en Afrique, avec en toile de fond une tendance à remettre ce que l’opinion considère comme un système néocolonial. Sauf que les déclarations en question n’ont pas été tenues par le dirigeant français.

Emmanuel Macron aurait qualifié d' »erreur historique » la fermeture annoncée de bases militaires françaises au Sénégal. Il aurait également déclaré que « sans la France, le Sénégal ne serait rien ». L’examen amène à conclure que ces propos n’ont pas été tenus par le président français.

« Monsieur Ousmane Sonko, vous avez fait le choix de rompre avec la France, mais sachez une chose : sans la France, le Sénégal ne serait rien. Nous avons été là dans les moments cruciaux de votre développement, et tourner le dos à cette coopération serait une erreur historique ».  C’est la citation intégrale attribuée au chef de l’État français, partagée sur les réseaux sociaux, Facebook, TikTok notamment.

Sur certaines pages ayant repris ce tweet supposé, du reste introuvable sur le fil d’actualité du compte officiel du président français, le message est accompagné de la voix d’Emmanuel Macron générée par l’intelligence artificielle.

Après vérification, il s’est avéré que cela a tout l’air d’un faux tweet généré à partir d’un générateur de tweets, en ce sens que le nom du compte officiel du président français est différent de celui du tweet qu’on lui a faussement attribué.

Un faux tweet ayant suscité des commentaires engagés

Une recherche effectuée sur les différents réseaux sociaux officiels d’Emmanuel Macron ne permet de retrouver ce tweet probablement généré par un logiciel. De même, aucune plateforme gouvernementale officielle de la France n’a évoqué cette déclaration.

Un citoyen sénégalais, visiblement tombé dans le piège de cette information erronée, a partagé le tweet sur Facebook avec ce commentaire : « L’État du Sénégal doit donner un ultimatum [le plus rapidement] possible à l’armée française de quitter le territoire sénégalais ». Il a ajouté : « L’animal blessé (Macron) devient violent, dangereux et très méchant ».

Un de ses compatriotes a aussi posté un commentaire tout aussi virulent, en donnant foi à ce tweet faussement attribué à Emmanuel Macron : « La France est un serpent blessé, il est plus dangereux en l’état. Elle a reçu un vrai coup de massue avec cette déclaration de Ousmane Sonko ».

Le faux tweet fait par ailleurs état d’un choix fait par le Sénégal de rompre avec la France, alors que la « rupture » prônée par les nouvelles autorités, ne veut pas en aucun cas dire rompre avec l’ancienne puissance coloniale.

Le pouvoir en place au Sénégal depuis avril dernier souligne simplement, à travers ce slogan, sa volonté d’établir une coopération « gagnant-gagnant » avec tous les partenaires. Il n’a, jusque-là, jamais été question pour Dakar de rompre avec la France. 

Lors d’une réception organisée le 14 juillet dernier, à l’occasion de la fête nationale de la France, l’ambassadeur Christine Fages avait assuré de la détermination de Paris de rester aux côtés du Sénégal pour relever les « défis communs » aux deux pays.

La diplomate a fait état de la volonté de la France de « poursuivre et renforcer la coopération dans les secteurs qui contribuent à une plus grande souveraineté du Sénégal, notamment la souveraineté et la transition énergétique, la souveraineté alimentaire, la souveraineté sanitaire, la formation professionnelle, le sport et bien sûr, la mémoire ».

Le contexte de cette désinformation

Le 6 janvier, lors de la conférence annuelle des ambassadrices et ambassadeurs français tenue à l’Élysée, Emmanuel Macron évoquait un « départ négocié » des bases militaires françaises en Afrique.

« Nous avons proposé aux chefs d’État africains de réorganiser notre présence. Comme on est très polis, on leur a laissé la primauté de l’annonce. Ne vous trompez pas, parfois il a fallu pousser.  Ce n’est pas parce qu’on est polis, corrects et qu’on se réorganise nous-mêmes qu’il faudrait que ce soit retourné contre nous en disant qu’on est chassés d’Afrique », a déclaré le chef de l’État français.

Le chef du gouvernement sénégalais, Ousmane Sonko, a réagi quelques heures plus tard à cette déclaration sur ses réseaux sociaux, en affirmant que « dans le cas du Sénégal, cette affirmation (du président français) est totalement erronée ».

« Aucune discussion ou négociation n’a eu lieu à ce jour et la décision prise par le Sénégal découle de sa seule volonté, en tant que pays libre, indépendant et souverain », a réagi le Premier ministre sénégalais dont les propos ont été largement repris par les internautes.

Le président Bassirou Diomaye Faye a fait part le 31 décembre de la décision du Sénégal de mettre fin dès 2025 à toute présence militaire étrangère sur le sol sénégalais.

Depuis cette date, il n’y a pas eu de déclarations officielles du président français sur la question de la fermeture des bases militaires françaises en Afrique, ou une réaction faisant suite à celle du Premier ministre sénégalais, comme veut le faire croire le faux tweet.

La propagation de fausses informations de ce genre se nourrit de l’arrivée au Sénégal de nouveaux dirigeants préconisant des partenariats justes et équilibrés entre la France et ses anciennes colonies africaines.

SMD/BK

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