Kalidou Diallo lève le voile sur les ressorts du 23 juin 2011
Kalidou Diallo lève le voile sur les ressorts du 23 juin 2011

SENEGAL-POLITIQUE-CONTESTATION

Dakar, 23 juin (APS) – Le projet contesté de réforme constitutionnelle instituant un ticket présidentiel ‘’n’était que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase’’, les manifestations du 23 juin 2011 s’étant déroulées dans un contexte marqué déjà par une campagne nationale et internationale contre un éventuel troisième mandat du président Abdoulaye Wade, analyse l’historien et ancien ministre Kalidou Diallo.

‘’Le projet de loi modifiant l’article 33 de la Constitution n’était que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase’’, a-t-il expliqué dans une interview accordée à l’APS, en revenant sur ces évènements politiques majeurs.

Selon Kalidou Diallo, qui enseigne l’histoire moderne et contemporaine à l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar, la contestation du 23 juin s’inscrivait dans un contexte de démobilisation du Parti démocratique sénégalais (PDS), au pouvoir, qui se trouvait confronté à une opposition unie, soutenue par une opinion publique nationale et internationale défavorable à une troisième candidature d’Abdoulaye Wade à l’élection présidentielle.

M. Wade avait annoncé sa volonté de briguer un nouveau mandat depuis les États-Unis, en septembre 2009, alors qu’il avait déjà 83 ans, a rappelé Kalidou Diallo, en revenant sur les ressorts du soulèvement du 23 juin 2011, qui partaient des soupçons de dévolution monarchique du pouvoir. Des soupçons selon lesquels Karim Wade succèderait à son père.

‘’Ce reniement du pape du Sopi (le surnom d’Abdoulaye Wade, Sopi étant un mot wolof signifiant le changement) à sa parole de ne pas se représenter, après sa victoire de 2007, a profondément choqué les Sénégalais. Lui-même avait reconnu que la Constitution de 2001 limitait les mandats à deux. Ce ‘wax waxeet’ (le reniement de sa parole, en wolof) a été perçu comme une faute grave dans notre culture politique’’, souligne Kalidou Diallo.

Pour ne rien arranger, la publication du livre ‘’Comptes et mécomptes de l’ANOCI’’, du journaliste Abdou Latif Coulibaly, en août 2009, a contribué à renforcer, à ses yeux, les soupçons d’une tentative de transmission héréditaire du pouvoir.

Ce livre dénonçait la gestion de l’ANOCI, l’Agence nationale pour l’Organisation de la conférence islamique, dirigée par Karim Wade, avant que ce dernier ne soit nommé ministre.

‘’Une vaste campagne s’est installée dans l’opinion, prêtant à M. Wade la volonté de se faire remplacer par son fils. Et comme le disait Karl Marx, ‘quand les idées pénètrent les masses, elles deviennent matérielles’’’, commente l’ancien ministre de l’Éducation nationale.

L’universitaire, dont les travaux académiques portent essentiellement sur le syndicalisme, est d’avis que ‘’dans un tel climat, l’introduction d’un projet de loi instituant un poste de vice-président, sur la base d’un ticket présidentiel, n’a fait que renforcer les soupçons d’une tentative de succession dynastique du pouvoir’’.

‘’Même si Abdoulaye Wade a toujours réfuté cette intention, ce projet de loi a été perçu comme une confirmation de cette volonté. C’est pourquoi il a été massivement rejeté par la rue’’, analyse l’historien et ancien ministre.

HB/MK/BK/SMD/ESF

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