Dakar, 24 oct (APS) – Le leadership des femmes dans le domaine des sciences, technologies, ingénieries et mathématiques doit être mis à profit pour des réponses holistiques aux défis sanitaires et climatiques désormais étroitement liés, ont plaidé plusieurs intervenants lors d’un panel tenu jeudi à Dakar dans le cadre de la 7ᵉ édition du Forum Galien Afrique.

“L’apport des femmes des sciences dans l’action climatique et les défis sanitaires a été déterminant, leur participation et leur leadership sont associés à d’excellents résultats tant en matière de gouvernance, si elles arrivent à accéder à des postes de décision, qu’en matière de gestion de ressources, en faisant des choses qui impactent sur la société de manière positive”, a souligné le recteur de l’université du Sine Saloum El Hadj Ibrahima Niasse, Ndèye Coumba Touré Kane.

Pourtant, malgré ce constat, les femmes de sciences, note-t-elle, “sont absentes la plupart du temps des postes de prise de décision face aux crises climatiques qui engendrent des épidémies et sont à l’origine des maladies ré-émergentes”.

“Quand on parle de leadership des femmes, la situation est décourageante parce qu’elles sont sous-représentées dans les postes de décision”, a-t-elle souligné.

Et pourtant, les femmes “sont au cœur du dispositif pour faire face à des catastrophes”, selon l’enseignante-chercheure.

”Il faut que ces femmes soient considérées, il faut les mettre devant afin qu’elles offrent l’ensemble des connaissances et des expériences qu’elles ont acquises pour une meilleure adaptation des populations vis-à-vis des changements climatiques”, a souligné Ndèye Coumba Touré Kane, membre du groupe “One Health” de l’Académie des sciences et techniques du Sénégal.

Cette pharmacienne biologiste spécialisée en bactériologie virologie a travaillé sur l’impact des changements climatiques sur l’alimentation et la santé, en utilisant une nouvelle approche de changement de la qualité de l’air pour la détection d’agents pathogènes.

À l’université du Sine-Saloum El Hadj Ibrahima Niass, les résultats montrent que 80% des majors dans les différentes filières sont des filles, alors que ces dernières, dit-elle, ne font 47% des effectifs. 

Les femmes de sciences “ont des difficultés à se faire entendre”, affirme de son côté la présidente de l’Association des femmes médecins du Sénégal, professeur Fatou Samba Ndiaye.

Mme Ndiaye, par ailleurs enseignante-chercheure à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, a évoqué des contraintes liées au statut de femme tout court, de femmes scientifiques, de mère de famille.

Elle a cité une étude de l’Unesco, selon laquelle, malgré une augmentation du nombre de femmes dans les filières scientifiques, sur trois chercheurs, on ne compte qu’une seule femme.

Durant la pandémie de la covid-19, “les femmes ont été en première ligne pour affronter les problèmes sans précédent. Cependant, bien que leur contribution soit essentielle pour faire face aux urgences actuelles, les femmes scientifiques ne sont pas encore suffisamment visibles et nombreuses”, selon professeur Fatou Samba Ndiaye.

Elle a rapporté que sur les 133 dirigeants mondiaux ayant participé à la Cop 28, aux Émirats arabes unis, il n’y avait que 15 femmes.

“Mais alors qu’elles sont exclues de ces postes de décision de l’agenda climatique mondiale, ce sont elles qui sont les plus vulnérables”, a-t-elle relevé lors de ce panel axé sur le rôle des femmes de sciences dans les crises climatiques et environnementales.

L’ancienne ministre de la Famille, Ndioro Ndiaye, présidente du Réseau pour l’égalité homme-femme et modératrice de ce débat, a insisté sur l’importance de la mise en réseau des femmes de sciences qui doivent se positionner en modèles et mentors pour encourager la jeune génération.

“Les femmes ont un leadership inné, mais elles doivent s’affirmer pour être visibles, pour faire entendre leurs voix et faire prévaloir leurs compétences”, a plaidé le professeur Ndioro Ndiaye.

Venue du Collège universitaire des sciences de la santé de Makeréré, une école de santé publique en Ouganda, Suzanne Kiwanuka a relevé également la nécessité pour les femmes scientifiques de “bâtir des alliances fortes entre elles en Afrique, pour faire partie des solutions face aux crises sanitaires engendrées par les changements climatiques”.

“Les femmes scientifiques doivent être en mesure de donneur leurs solutions face à ces nombreux défis parce qu’elles sont les plus vulnérables”, a soutenu l’universitaire, maitre de conférences au département planification et gestion des politiques de santé du Collège universitaire des sciences de la santé de Makeréré.

Plusieurs intervenants, dont le président de l’École des Hautes études économiques, commerciales et d’ingénierie du Maroc, le professeur Moulay Ahmed Lamarani, ont soutenu l’idée de voir les femmes scientifiques jouer “leur rôle avec ou sans l’appui des hommes”. De par leurs compétences et leurs connaissances, les femmes ont un rôle à jouer dans la préservation des valeurs de la société africaine, a-t-il indiqué.

Le Forum, ouvert mardi pour “promouvoir l’excellence et l’innovation en matière de recherche”, est axé sur le thème “Actions sanitaires et communautaires face aux crises climatiques et environnementales en Afrique”.

Il prend fin vendredi avec l’attribution du Prix Galien Afrique, édition 2024.

ADL/BK

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